Une centaine d’animaux, coqs, tourterelles, ours, panthères et autres grues cendrées, envahiront du 5 novembre au 18 décembre la galerie Brame et Lorenceau. Ces bronzes, marbres, pierres, plâtres de François Pompon (1855-1933), pour la plupart inconnus, proviennent tous de collections particulières. Cette rétrospective, organisée cinq ans après l’exposition du Musée d’Orsay, permet de mieux connaître un artiste qui a su renouveler la sculpture animalière, grâce à un parti pris de simplification des formes.
PARIS. “Les bêtes posent fort bien et même beaucoup mieux que les hommes et les femmes, car l’immobilité pour eux est un repos. Et puis la bête, même quand elle comprend qu’on la regarde, ne perd pas son naturel”, expliquait Pompon à Ch. Terrasse en 1927, dans Art d’aujourd’hui.
Connu pour ses ours, coqs, poules ou tourterelles, François Pompon ne s’est pourtant consacré entièrement à la sculpture animalière qu’à partir de 1909, à l’âge de 54 ans. Dans la préface du catalogue raisonné de l’artiste, Anne Pingeot, conservateur au Musée d’Orsay, émet quelques hypothèses sur les raisons de cette spécialisation tardive. “Fut-ce l’éditeur de la rue Royale, A.A. Hébrard – lui qui prit sous contrat Rembrandt Bugatti encore mineur, exposant ses statuettes d’animaux sauvages dès 1904 – qui, sentant le marché du bronze animalier renaître, l’aurait poussé dans cette voie, refleurissante comme au XIXe siècle ?” Formé à la Petite école, qui deviendra en 1877 l’École nationale des arts décoratifs, par Aimé Millet, Joseph Caillé et Pierre Rouillard – un grand animalier qui lui fit découvrir la ménagerie du Jardin des Plantes –, Pompon approfondit sa connaissance du métier au service de Rodin, chez qui il entre en 1890. Ce dernier lui enseigne sa théorie des profils, mais aussi l’art du mouvement qui synthétise plusieurs gestes en un. À partir de 1896, il quitte l’auteur du Baiser pour Saint-Marceaux, qui l’emploie à temps plein comme praticien. À Cuy-Saint-Fiacre, en Normandie, où il accompagne les Saint-Marceaux l’été dans leur propriété, il étudie pendant ses rares heures de loisir les animaux des fermes environnantes. L’hiver, il observe ceux du Jardin des Plantes et découvre que le réalisme passe par autre chose que l’exactitude. Pompon est obsédé par la quête du mouvement : “C’est le mouvement qui détermine la forme [...] ; ce que j’ai essayé de rendre, c’est le sens du mouvement. Au Jardin des Plantes, je suis les animaux quand ils marchent [...]. C’est curieux : je rencontre beaucoup de jeunes sculpteurs qui observent comme moi les animaux mais ne les suivent pas. Ce qui est intéressant, c’est l’animal qui se déplace.”
Une aptitude à dégager les traits caractéristiques
Des pièces comme l’ours brun, les canards ou l’hippopotame, présentées chez Brame et Lorenceau, traduisent cette recherche du mouvement et révèlent le modernisme de ses travaux, marqués par un parti pris de simplification. Celle-ci exige de l’artiste une rapidité, une aptitude à dégager en quelques secondes les traits caractéristiques d’un animal. En témoignent Le Coq dormant à la crête dressée comme une voile et à la queue en panache, piquant du nez pour picorer quelques grains (bronze à patine brune, cachet cire perdue A.A. Hébrard, numéroté D1, fonte exécutée le 24 mai 1933, 22,5 x 28,5 x 12 cm), La Tourterelle endormie (bronze à patine brune, cachet cire perdue, fonte exécutée entre 1922 et 1932, 24,5 x 8,7 x 9,5 cm), ou encore La Panthère mouchetée progressant lentement, sans perdre des yeux sa proie (bronze à patine brun rouge, 9,5 x 22,5 x 5,5 cm, modèle exécuté entre 1924 et 1930). Les œuvres exposées ne sont en principe pas à vendre. “En organisant des expositions boulevard Malesherbes, nous voulons inciter les collectionneurs à nous rendre visite dans notre galerie, et pas uniquement sur nos stands à la Biennale des antiquaires, à Maastricht ou New York, explique Sylvie Brame. Nous souhaitons, en outre, leur faire découvrir nos locaux, qui se sont agrandis de deux nouveaux salons.” La visite leur permettra aussi de mesurer la parenté entre les créations du sculpteur bourguignon et celles de Constantin Brancusi. La formule de François Pompon, “J’aime la sculpture sans trous ni ombres”, ne se rapproche-t-elle pas de celle de l’artiste d’origine roumaine, qui déclarait avoir “supprimé les creux et les ombres” ?
5 novembre-18 décembre, galerie Brame et Lorenceau, 68 bd Malesherbes, 75008 Paris, tél. 01 45 22 16 89, tlj sauf dimanche 10h30-18h30. Catalogue, 112 p., 91 ill., 200 F.
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Festival Pompon
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°91 du 22 octobre 1999, avec le titre suivant : Festival Pompon