Le marché des ventes publiques d’art contemporain a atteint à Paris un niveau historique pendant la FIAC.
PARIS - Les ventes aux enchères d’art contemporain se portent comme un charme. À Paris, les maisons de ventes Artcurial et Cornette de Saint Cyr ont dans ce domaine réalisé en octobre leur meilleure performance dans le contexte dynamisant de la FIAC (Foire internationale d’art contemporain). Avec 5,9 millions d’euros les 28 et 29 octobre, la SVV Cornette de Saint Cyr a enregistré son plus gros succès dans cette spécialité tandis qu’Artcurial a décroché le 28 octobre le record historique de 9,3 millions d’euros pour une vente d’art contemporain en France. La maison confirme ainsi son leadership pour cette spécialité dans l’Hexagone. À l’hôtel Dassault, sous le marteau de Francis Briest, la dispersion de huit toiles importantes issues de la collection personnelle du galeriste Jean Fournier a créé l’événement, à commencer par Salut Sally, un tableau de 1970 de Joan Mitchell, estimé 1 à 1,5 million d’euros. Il s’est envolé à 2 586 000 euros à l’issue d’une bataille d’enchères téléphoniques entre collectionneurs américains et européens. Il s’agit de la plus haute enchère atteinte pour l’art contemporain en France en 2006 et d’un record du monde pour une œuvre de l’artiste américaine. « Il n’y a pas qu’à New York que les prix se font, se félicite Francis Briest, qui n’hésite pas à défier ses concurrents dans leur propre monnaie. Ce record absolu de 3,3 millions de dollars [2,6 millions d’euros] pour Joan Mitchell dépasse de près de 30 % les précédents prix obtenus par les maisons anglo-saxonnes, c’est-à-dire les 2,69 millions de dollars enregistrés par King of Spades (1956), chez Sotheby’s à New York le 9 novembre 2004 et les 2,48 millions de dollars pour une toile Sans titre de 1957, vendue à New York chez Sotheby’s le 9 novembre 2005. » Dans une ambiance survoltée répondant à un record de fréquentation, de nombreuses belles enchères ont fait écho au lot phare de la vente, ainsi pour ces trois autres pièces de la collection Fournier : 700 000 euros pour Champs, une toile de 1990 de Mitchell emportée par un collectionneur français au double de son estimation ; 390 800 euros pour Après la nuit, un tableau de Jean-Paul Riopelle peint vers 1957 et acquis par un Britannique, et 333 000 euros pour une Étude de 1969 par Simon Hantaï qui a trouvé place dans une collection française. L’abstraction d’après guerre a triomphé dans le reste du catalogue à l’instar d’une peinture de Pierre Soulages de 1963, achetée par un particulier anglais pour 505 000 euros ; d’une Composition abstraite de 1959 de Serge Poliakoff partie vers la Suisse pour 313 000 euros ou de l’Intérieur d’église ou la Nef, toile de Maria Elena Vieira da Silva datée de 1955, défendue jusqu’à 205 000 euros par un collectionneur portugais.
L’art chinois en tête
À Drouot-Montaigne, la SVV Cornette de Saint Cyr a aussi fait le plein et marqué des points. « Le marché est très porteur, souligne l’expert Wilfrid Vacher. Les enchères réalisées à Paris sont dignes des résultats obtenus par Christie’s et Sotheby’s à Londres ou à New York. » Une section forte consacrée à l’art chinois a décroché le jackpot, notamment grâce à un marché asiatique très actif. Avec un produit de 1,7 million d’euros, « cette vacation devient la première vente d’art chinois en France », affiche la maison. Le lot phare, La Forêt verte, un grand tableau de Zao Wou-ki de 1953, estimé 500 000 euros, est parti pour Taïwan sur une enchère de 851 000 euros. La deuxième enchère revient à une Composition datée de 2000 de Zao Wou-ki, adjugée 223 800 euros à un amateur français contre un Chinois. Parmi les meilleurs prix, notons encore les 105 200 euros pour une huile sur toile de 1988 de Yan Pei-Ming ; les 182 700 euros pour une petite Composition de Nicolas de Staël qui reste en France, ou encore les 126 650 euros atteints par L’Éléphant en bronze d’Arman, pièce unique qui ira à Taïwan.
La vitalité du marché parisien va-t-elle pousser Christie’s et Sotheby’s à organiser des vacations plus internationales sur le sol français ? « Le marché est fort partout, réplique laconiquement Florence de Botton, directrice internationale du département art contemporain de Christie’s. Il est drainé par l’argent qui circule dans le monde entier. La rapidité de la transmission des informations contribue à son dynamisme. » Loin d’être absente de la scène parisienne au moment de la FIAC, l’auctioneer a mené une vente entièrement dédiée à l’œuvre de Jean Pierre Raynaud. Dans un acte radical, l’artiste français livrait 85 pièces sur le marché. De nombreux collectionneurs, galeries internationales et institutions ont d’autant plus répondu présent que la vente était annoncée « sans prix de réserve », ce qui les a libérés de tout joug commercial. Sens Sens, œuvre de 1962, a été adjugée à un acheteur européen au téléphone au prix record de 303 200 euros. Un Sens interdit de la même année a été préempté à hauteur de 40 800 euros par Bernard Blistène, pour le FNAC (Fonds national d’art contemporain). Troisième prix de la vente, Objet Drapeau, 2005, a été acheté par le Musée d’art moderne et contemporain (Mamac) de Nice pour 110 400 euros. Également, le Nouveau Musée national de Monaco s’est porté acquéreur d’une Croix rouge de 1963 et le FRAC (Fonds régional d’art contemporain) de Bretagne a emporté deux pièces de l’artiste. L’art contemporain a donc battu son plein à Paris. Le deuxième round de la saison parisienne sera pour fin novembre-début décembre avec en lice Christie’s, Sotheby’s, Tajan et Piasa.
ARTCURIAL : ART CONTEMPORAIN - Expert : Martin Guesnet - Résultats : 9,3 millions d’euros - Nombre de lots vendus/invendus : 95/35 - Lots vendus : 73 % CORNETTE DE SAINT CYR : ART CONTEMPORAIN - Expert : Wilfrid Vacher - Résultats : 5,9 millions d’euros - Nombre de lots vendus/invendus : 176/82 - Lots vendus : 68,2 % - Valeur : 98,5 % CHRISTIE’S : JEAN PIERRE RAYNAUD (SANS PRIX DE RÉSERVE) - Expert : Caroline Smulders (consultante extérieure) - Résultats : 2,2 millions d’euros - Nombre de lots : 85 - Lots vendus : 100 % - Valeur : 100 % - Préemption : 1
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Euphorie totale
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°247 du 17 novembre 2006, avec le titre suivant : Euphorie totale