PARIS - C’est une exposition presque de synthèse du travail de l’Allemand Markus Lüpertz (né en 1941) que propose la galerie Suzanne Tarasiève, à Paris.
Non qu’elle couvre de manière rétrospective toutes les étapes de sa carrière. Mais, depuis les Baumstammen de 1966 jusqu’aux tableaux récents et inédits, l’accrochage souligne la récurrence de certains motifs, comme la coquille d’escargot, le casque militaire ou la statuaire classique.
On le savait, Lüpertz occupe une place singulière dans la génération de la défaite qui a voulu en découdre avec les pères. Pour mener son travail provocateur de mémoire, il a ravivé des motifs germaniques honnis en les court-circuitant, de manière aussi violente que surréaliste. Le parcours débute avec la série des Dithyrambes, un mot tout droit sorti du vocabulaire nietzchéen. Cet ensemble permet à Lüpertz de résoudre l’aporie entre abstraction et figuration. Que voit-on ? Des troncs d’arbre fendus en croix, en signe de la division allemande, mais aussi réminiscences du symbole nazi. Des œuvres allégoriques qui jouxtent les sculptures d’Hercule, bariolées, grossières, presque grotesques, démesurés et dérisoires à la fois. Une ironie qui se perçoit tout autant dans les bozzetti, ces petites sculptures représentant aussi bien Athéna que le torse d’Hercule. C’est aussi en ces terres mythologiques que braconnent les tableaux récents, tous composés selon un protocole identique, une statue antique brossée de manière plus ou moins précise occupant la partie droite de la toile. Sur le pan gauche, l’artiste introduit parfois une silhouette brune hiératique, mais surtout insère son vocabulaire obsessionnel, de l’escargot à la botte.
Munch et Beckmann
La question, traversant cet accrochage pétri de références mythologiques est lancinante : Lüpertz serait-il un peintre classique ? Est-il nostalgique d’une Arcadie perdue ? L’homme, nourri au biberon de Munch, Picasso et Max Beckmann, et dont la vocation de sculpteur s’est déclarée avec la découverte des sculptures de Maillol, se méfie des avant-gardes. Malgré tout, il évite de justesse la régression archaïsante en trouvant un fragile point d’équilibre entre le passé et le présent. Selon lui, l’art ne relève pas de l’évolution ou de la révolution. Il est éternel retour. Comme le souligne très justement l’historien de l’art Éric Darragon dans le catalogue de l’exposition, « pour lui, le classicisme, loin d’être l’esthétique d’une époque donnée, est le long processus séculaire qui rend le passé lisible. Ce qui rend compréhensible une forme que seul le fragment rend visible, forme constituée comme un langage d’éléments artificiels par lesquels l’esprit surmonte la pesanteur du réel, le faux-semblant du style, la platitude de l’opinion »
Œuvres : 12 sculptures, 18 peintures, 25 dessins
Prix : 30 000 à 240 000 euros
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Éternel Lüpertz
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°353 du 23 septembre 2011, avec le titre suivant : Éternel Lüpertz