Avez-vous fait toute votre carrière chez Christie’s ?
Pratiquement, puisque j’y travaille depuis vingt et un ans. J’ai démarré à Londres chez Phillips, comme spécialiste puis directeur du département des Estampes. J’ai rejoint Christie’s en 1989 dans la même spécialité. En 1995, j’ai pris la direction du département basé à New York. Trois ans plus tard, j’ai été nommé directeur international du groupe Christie’s. Depuis 2002, j’assure en plus la fonction de vice-président de Christie’s Amériques.
Comment s’articule le marché des estampes ?
Nous organisons une fois par an, en décembre à Londres, une vacation d’estampes consacrée aux maîtres anciens, en essayant de nous concentrer sur un artiste. La dernière vente du 8 décembre comprenait un mélange de plusieurs artistes, dont deux importants ensembles de planches d’Albrecht Dürer et de Rembrandt. Par ailleurs, quatre ventes annuelles d’estampes modernes et contemporaines se tiennent à New York et à Londres.
Comment évolue ce marché ? A-t-il été touché par la crise ?
Le domaine des estampes a subi le contrecoup de la crise financière. Cela s’est manifesté par une importante baisse de volume des ventes due à une crise de confiance des propriétaires, alors que la demande pour des œuvres de qualité n’a jamais faibli. Pour l’année 2007, le département des Estampes a enregistré un chiffre d’affaires de 60 millions d’euros, en augmentation de 20 % en valeur par rapport à 2006. En 2008, le produit de ventes n’a pas dépassé les 30 millions d’euros, pour descendre à 15,5 millions d’euros l’an dernier.
Que recherchent les collectionneurs ?
Les amateurs d’estampes anciennes veulent les planches les plus rares, dans l’état de conservation le meilleur qui soit, en tenant aussi compte de la qualité du tirage et de la date d’édition, la plus tôt possible. C’est un marché assez stable. La provenance, pour une gravure ancienne, peut avoir son importance, ce qui n’est pas le cas pour les estampes modernes et contemporaines.
Quelles sont les œuvres modernes et contemporaines les plus prisées ?
Pour l’art moderne, les estampes de grands artistes comme Pablo Picasso, Henri Matisse et Marc Chagall sont très recherchées. Pour l’art d’après-guerre, les multiples d’Andy Warhol, Robert Rauschenberg, Jasper Johns et Frank Stella recueillent beaucoup d’intérêt. Plus l’image est iconique, plus les prix montent. Ainsi, pour une sérigraphie de Warhol, les prix varient de 2 000 à 100 000 euros pour une belle et rare Marylin.
Qu’est-ce qui fait d’un multiple une œuvre d’art à part entière ?
Le fait que l’artiste l’ait conçue comme telle. Aujourd’hui, les œuvres d’édition sont considérées comme une opportunité supplémentaire de collectionner de l’art. C’est parfaitement admis des collectionneurs. Les multiples offrent un choix incroyable pour tous les goûts et tous les budgets. Certaines œuvres d’édition n’ont même rien à envier aux pièces uniques. Rappelons que la sculpture de Giacometti L’Homme qui marche I, qui a récemment battu tous les records en vente publique, est issue d’une édition de dix exemplaires.
Qu’est-ce qui nécessite, cette année, votre arrivée à Paris dans l’équipe de direction de Christie’s France ?
En 2009, j’étais venu prêter main-forte à l’équipe de Paris, à l’occasion de l’organisation de la vente au Grand Palais de la collection Yves Saint Laurent et Pierre Bergé. J’ai alors beaucoup travaillé avec François de Ricqlès, promu président de Christie’s France en 2010, et cela a très bien fonctionné. Si je suis désormais basé à Paris, c’est pour développer davantage l’antenne France de Christie’s, dans le cadre d’une stratégie internationale de développement du groupe.
Dans quelles directions allez-vous œuvrer ?
Les départements parisiens d’art moderne et contemporain, menés par une excellente équipe, obtiennent de très bons résultats. Mais nous sommes beaucoup moins forts pour les arts premiers, alors que Paris est la place centrale pour ce marché. Ce domaine mérite d’être plus dynamique chez Christie’s. L’Art déco est un secteur dans lequel nous avons toujours bien réussi, mais, loin de nous endormir sur nos lauriers, nous pensons qu’il faut là aussi pousser plus loin nos capacités.
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Entretien avec Jonathan Rendell
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°319 du 19 février 2010, avec le titre suivant : Entretien avec Jonathan Rendell