La Galerie Tendances présente Rudolf Schlichter.
PARIS - C’est dans le restaurant tenu par son frère à Berlin que Rudolf Schlichter (1890-1955) a fréquenté artistes et intellectuels de la Nouvelle Objectivité. Né en Allemagne au lendemain de la Grande Guerre, ce mouvement prit le parti de décrire sans concession la communauté urbaine de son époque. Saisis au naturel, les acteurs du Berlin des années 1920 peuplent les 25 dessins de Schlichter exposés à Paris jusqu’à la fin du mois de janvier à la Galerie Tendances.
Issu de l’Académie des beaux-arts de Karlsruhe (Allemagne), reconnue pour son enseignement du dessin, Schlichter excellait dans cette capture du quotidien. À la mine de plomb ou à la plume, il croque des « gueules », au grand dam des autorités nazies qui confisqueront en 1937 17 de ses œuvres, représentant : une homosexuelle, une jeune communiste, un chômeur, un boucher, une prostituée, un mutilé... Autant de sujets « dégénérés » rendus avec grâce par l’artiste, fervent partisan de la gauche radicale. Loin des scènes de café, son modèle préféré est son épouse Speedy, qui apparaît quatre fois dans l’exposition, tantôt grave, tantôt pensive. Selon la galeriste Michèle Heyraud, Schlichter se distingue néanmoins par son « regard moins cruel que celui d’Otto Dix ou de George Grosz ». Elle s’amuse à rappeler une confidence que lui avait faite Maja Beckmann, belle-fille de Max Beckmann, stigmatisant l’aversion des collectionneurs français : « L’art allemand est considéré comme brutal. »
Douceur
S’il est vrai que les expressions des personnages que Schlichter choisit de décrire trahissent la brutalité de la vie allemande après la Première Guerre, une certaine douceur vient enrober son trait vif et son regard souvent tendre. Curieusement, les collectionneurs allemands ne sont pas particulièrement intéressés par la Nouvelle Objectivité, lui préférant l’expressionnisme du groupe Die Brücke. Selon Michèle Heyraud, les plus grands admirateurs de l’artiste allemand sont américains. La très courte période (1920) inspirée par la pittura metafisica de Giorgio Di Chirico est également très recherchée. L’exposition de la rue Quincampoix est l’occasion de profiter de prix encore très abordables, situés entre 6 000 euros et 15 000 euros. En 2006, la rétrospective new-yorkaise préparée par Sabine Rewald, conservatrice au Metropolitan Museum of Art, promet d’avoir un grand impact sur la cote de l’artiste.
Jusqu’au 29 janvier 2005, Galerie Tendances, 105, rue Quincampoix, 75003 Paris, tél. 01 42 78 61 79, tlj sauf dimanche et lundi, 14h30-19h. Catalogue édité par la galerie, 56 p., ISBN2-9084-580012
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En toute objectivité
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°204 du 3 décembre 2004, avec le titre suivant : En toute objectivité