Drouot veut se réorganiser pour faire face à l’arrivée en France, dans deux ans, de Sotheby’s et Christie’s, au moment où son chiffre d’affaires, contrairement à celui, florissant, des grandes maisons de ventes britanniques, est sérieusement en baisse. Me Guy Loudmer et Me Jacques Tajan critiquent la gestion de Drouot.
PARIS - Pour réagir à une baisse des affaires – le chiffre d’affaires de Drouot a diminué de 7 % en 1995 – et lutter contre l’arrivée des maisons de vente étrangères à Paris, Me Joël-marie Millon lance ce qu’il qualifie d’entreprise "passionnante" et de "chance historique pour rebâtir notre profession". Il s’agit de la préparation d’une organisation toute nouvelle des commissaires-priseurs à Paris, "le Grand Drouot".
Dès l’ouverture du marché en 1998, comme le souhaite le président de la Compagnie des commissaires-priseurs de Paris, le Grand Drouot sera un "holding", une société regroupant les actions de plusieurs études, grâce à la future législation sur les sociétés commerciales à objet civil, en "sociétés de ventes".
Le principe du Grand Drouot, élaboré par Drouot et les cabinets de conseil Gide Loyrette Nouel et Arthur Andersen, est une version revue et corrigée de l’ancien projet de fédération. Les commissaires-priseurs qui choisiront de faire partie du Grand Drouot verseront à Drouot S.A., le "holding", une part de leurs indemnités, baptisées "Aide à la restructuration ou au rachat des études" (ARE). Le principe de cette indemnisation, dont les modalités restent à déterminer, a été promis l’an dernier par le gouvernement. Ainsi recapitalisé, Drouot S.A., distribuera en contrepartie, et en fonction de l’apport, des actions dont les dividendes seront payés aux commissaires-priseurs. Dans la plupart des cas, ces derniers seront déjà regroupés dans des études plus importantes – les premiers de ces regroupements, selon Me Millon, devant intervenir dans les prochaines semaines.
"Il faut d’abord faire le ménage"
"Il ne s’agit surtout pas de réinstaurer une sorte de bourse commune qui permettrait à certains de s’endormir, insiste Me Millon. La prospérité du Grand Drouot se fera en fonction des efforts et des affaires de ses membres. Nous avons la chance de bâtir un modèle de ventes à la française. Pourquoi faire une mauvaise copie quand on peut faire un bon original ?"
Fin février, Me Millon devait demander officiellement aux commissaires-priseurs de Paris s’ils souhaitaient adhérer à son projet. À part quelques confrères qui choisiront de partir à la retraite, il espère que la majorité des études y seront favorables. Certaines, cependant, s’interrogent. Me Guy Loudmer qui, avec Me Jacques Tajan, a demandé au tribunal de commerce de Paris d’ordonner un audit de Drouot, estime que le projet de Me Millon "met la charrue avant les bœufs." Il reproche à la compagnie parisienne d’être mal gérée et de pratiquer, en particulier, un système de location de salles, avec un loyer proportionnel au produit des ventes, qu’il considère injuste. "À force de payer en fonction de ses revenus il n’y aura bientôt plus de revenus," nous a confié Me Loudmer, "Le Grand Drouot, c’est une bonne idée. Mais à condition que l’on sache comment on va vivre. Il faut, d’abord, faire le ménage. Il faut que Drouot fonctionne d’une façon juste."
Me Tajan, pour sa part, critique "la gestion collective" de Drouot, et affiche une attitude prudente. "Je n’ai rien contre Drouot en tant que tel," se défend-il. "Mais les charges exigées par la Compagnie me rendent non-compétitif à l’égard des Anglais. Si les choses doivent continuer ainsi, je serais très peu enclin à participer au Grand Drouot. Mais s’il y avait une meilleure et plus juste répartition des charges, pourquoi pas ? Actuellement, nous n’en savons pas assez sur le projet."
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Drouot dévoile ses plans
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°23 du 1 mars 1996, avec le titre suivant : Drouot dévoile ses plans