Parallèlement à l’exposition présentée au Quai Branly, la galerie Alain Bovis rend hommage aux Dogons.
PARIS - Dans le sillage de l’exposition « Dogon » organisée jusqu’au 24 juillet au Musée du quai Branly [sur laquelle nous reviendrons dans le prochain numéro], la galerie Alain Bovis, à Paris, propose une sélection de pièces de cette tribu regroupée sur le plateau rocheux du Bandiagara au Mali. Bien que l’art Dogon soit devenu un grand classique du répertoire africain, les œuvres importantes restent très rares. Collectées dès les années 1930 par le Musée de l’Homme, puis dans les décades 1950-1960 par les amateurs, ces sculptures ont souvent été jalousement conservées. Ainsi, parmi les objets présentés par Alain Bovis, certains sont restés pendant quarante ans dans la même collection. Cette statuaire se caractérise notamment par son ancienneté. L’accrochage se compose ainsi d’objets du XVIe et parfois même du XIe siècle. Une gageure, alors que la plupart des pièces d’art africain présentées en galerie remontent au mieux au XIXe siècle. L’exposition révèle aussi la subtilité de la pensée Dogon, certes dualiste, mais nourrie d’une cosmogonie complexe. Des différences stylistiques pointent enfin entre les œuvres petites et stylisées réalisées dans la falaise sud, et celles naturalistes et fluides venant du plateau nord.
Dans la cosmogonie des Dogons, l’eau joue un rôle fondamental. L’exposition montre ainsi un petit personnage aux bras levés, en signe d’imploration au dieu Amma. Cette figure dont l’invention est attribuée aux Tellem, prédécesseurs des Dogons sur cette terre rocailleuse, fut aussi identifiée par l’ethnologue Marcel Griaule comme l’arbre cosmique, médiateur entre les hommes et le créateur. L’importance de l’eau dans cette région désertique est également lisible dans une Maternité du plateau nord, représentant une femme le bras levé tenant un récipient sur la tête. Celle-ci incarne la fécondité, mais aussi la pourvoyeuse d’eau. D’autres aspects de la mythologie Dogon sont au menu. Un joueur de flûte du XVe siècle, dont on ne connaît que deux autres exemplaires dans le monde, représente Dyongu Seru, personnage au statut ambigu ressuscitant son frère Lebe Seru sous la forme d’un serpent. Un siège datant des XVIe-XVIIe siècle reprend aussi les grandes lignes de la mythologie Dogon, le plateau supérieur représentant le Ciel tandis que l’inférieur renvoie à la Terre.
L’axe central s’articule autour d’Amma et des quatre ancêtres bras levés. On remarque dans le panel une émouvante statuette de petite dimension, enveloppée d’une épaisse matière sacrificielle, représentant un homme se tenant la tête entre les mains en un geste de désespoir. Une posture de honte qui pourrait être celle de Dyong Seru après avoir connu le péché d’inceste avec sa mère, la Terre. Alain Bovis présente enfin une pièce plus modeste, un pilier togu na, traditionnellement posé à l’entrée de la Maison des hommes, lieu des palabres. Car pour les Dogons, le dialogue et le message constituent le fondement de la vie sociale.
Jusqu’au 14 mai, galerie Alain Bovis, 8, rue de Beaune, 75007 Paris, tél. 01 56 24 09 25 www.alainbovis.com du mardi au samedi 11h-13h, 14h30-19h.
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Dialogue et message
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°345 du 15 avril 2011, avec le titre suivant : Dialogue et message