Pour peu qu’ils soient anciens, les jouets échappent aux enfants pour accéder au statut d’objets de collection. Ils deviennent alors avidement recherchés par les amateurs.
Rien de tel qu’un jouet pour réveiller l’enfant qui sommeille en chacun de nous et, s’il est ancien, il acquiert un charme tout particulier, au point de susciter de véritables passions. Mais la typologie du jouet paraît moins simple à établir qu’on le penserait de prime abord. Il faut d’abord exclure les jeux de société, tels les échiquiers ou les cartes : les premiers, parfois magnifiques, entrent dans la catégorie des objets d’art, les secondes s’adressent à un public plus proche des amateurs d’estampes. De même, ne sera pas considéré comme jouet un objet lié à la pratique d’un sport. Enfin, ce qui semble être un jouet ne l’est pas toujours aux yeux d’un amateur averti, qui opérera une distinction entre les modèles réduits (qui s’apparentent aux maquettes) et les jouets proprement dits.
Ces limites posées, il n’en demeure pas moins que les jouets forment un vaste domaine, des poupées aux trains et des peluches aux automobiles, au point que chaque type d’objet donne lieu à des collections précises, chacune n’offrant que peu de points communs avec les autres. Les amateurs apparaissent ici hautement spécialisés : célèbre collectionneuse de poupées, Dina Vierny allait certes jusqu’aux automates, mais Henri Petiet se cantonnait, lui, dans les trains ; on pourrait multiplier les exemples en ce sens. Un sexisme certain transparaît aussi dans ce domaine : aux femmes, les poupées ; aux hommes, les trains et les voitures.
Contact direct avec les objets
Il faut également noter que les jouets ne sont devenus objets de collection qu’à une époque assez récente, vers le début des années cinquante. Et il fallut encore attendre une quinzaine d’années pour qu’aient lieu les premières ventes, qui eurent rapidement pour effet de compartimenter davantage encore ce secteur. Ainsi, en 1993, Christie’s organisait la première vacation exclusivement réservée aux ours en peluche ; dès l’année suivante, un ours de la marque Steiff atteignait 110 000 livres sterling, un record toujours inégalé. Les ventes tendent à rattraper l’actualité : certaines ne comportent plus de jouets anciens mais font la part belle aux poupées Barbie ou à GI Joe.
Cependant, nombre d’amateurs se concentrent sur les jouets de l’entre-deux-guerres ou ceux antérieurs à 1914. Ce sont en fait les seuls à être considérés comme de véritables objets de collection (de plus, ceux de fabrication récente sont souvent en plastique, un matériau qui vieillit mal). On recherche les jouets en fonction de critères somme toute peu différents de ceux qui régissent les choix dans d’autres domaines : rareté, originalité, état de conservation... C’est fréquemment par ce dernier que "pêchent" bien des jouets, ayant mal résisté aux manipulations que leur ont infligées leurs jeunes propriétaires. Ceci oblige l’amateur contemporain à une relative indulgence, et toute restauration n’entraîne pas nécessairement une forte décote. Un peu comme en numismatique, on classe les jouets en fonction de leur état, mais celui-ci importe d’autant moins que l’objet offre par ailleurs des traits qui le rendent désirable. Ce phénomène explique sans doute le fait que les amateurs, en vente publique, n’achètent pas par téléphone : ils se déplacent pour voir le jouet convoité et apprécier le charme qui s’en dégage.
Le monde du jouet semblera à juste titre complexe à l’amateur néophyte. La visite de collections publiques ou d’expositions temporaires, la lecture de l’abondante littérature sur le sujet l’aideront dans ses premiers pas. Mais rien ne remplace le contact direct avec les objets eux-mêmes, soit chez les marchands, soit lors de ventes aux enchères. C’est ainsi que se forment l’œil et le goût, ainsi que s’acquièrent les connaissances indispensables.
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Des jouets pour les grands
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°31 du 1 décembre 1996, avec le titre suivant : Des jouets pour les grands