Des bijoux réhabilités

Succès de l’exposition à la galerie Kugel

Par Éric Tariant · Le Journal des Arts

Le 20 octobre 2000 - 638 mots

Plus de 5 000 personnes se sont pressées dans la galerie des frères Kugel pour leur troisième exposition consacrée aux bijoux Renaissance réunissant environ 150 pièces datant du XIIIe au XVIIe siècle. Comme il y a deux ans, les marchands ont choisi de ne pas participer à la Biennale pour se concentrer sur leur galerie. Ils souhaitent contribuer à faire redécouvrir cette spécialité ébranlée par la multiplication des faux et ainsi, en s’appuyant sur l’expertise du docteur Rudolf Distelberger, directeur adjoint de la Kunstkammer du Kunsthistorisches Museum de Vienne, se débarrasser du climat de suspicion concernant leur authenticité.

PARIS - Sur un fond en émail bleu se détachent les silhouettes de Siméon, du Christ enfant et de la servante, tous trois vêtus de rouge. La robe de la Vierge est, elle, émaillée de couleur bleue. Cette plaque en or translucide figurant la Présentation au Temple est enserrée dans un cadre profond à section concave suspendu à une chaîne. Ce pendentif reliquaire aurait été exécuté entre 1375 et 1390. L’émail translucide, sur fond de métal précieux en basse taille, utilisé dans cette pièce s’est développé à la fin du XIIIe siècle puis s’est répandu à travers l’Europe pour devenir la technique prédominante du XIVe siècle. Du XIVe siècle également, on remarquera un pendentif reliquaire de saint Éloi en vermeil (280 000 francs). Cette pièce de forme trilobée alterne avec des motifs en pointe. Au sommet de chaque lobe est fixé un saphir en cabochon serti et le sommet de chaque pointe est décoré d’une petite perle. Un peu plus tardifs (vers 1520), quatre bas-reliefs en ronde bosse en or émaillé d’Allemagne du sud représentent des scènes de la Passion : le Christ au Mont des Oliviers, l’Arrestation du Christ, le Couronnement d’épines et la Résurrection (H : 62 mm). Ces plaques se composent d’éléments en or et or émaillé en appliques sur un fond d’argent émaillé. Il existe deux autres plaques de même dimension dont une, représentant le Christ devant Pilate, est conservée au Musée du Louvre. Le succès ne s’est pas fait attendre. Une quarantaine de pièces, proposées entre 40 000 francs et plusieurs millions de francs, avaient été vendues trois semaines avant la fin de l’exposition.

Un camée en agate, or et émail datant du XVIe siècle représentant une jeune femme nue, debout, saisie aux poignets par l’Ange de la Mort qui l’attrape par derrière (240 000 francs) était, lui, encore à négocier. Des colliers dont une pièce en or, émail, rubis et perles du XVe siècle, et deux autres composés d’éléments de parures de vêtements en or, émail, diamants, rubis et perles (Espagne, vers 1600) complètent cet ensemble. On remarquera aussi un ensemble de croix dont une fine pièce de Ermut de Brandenburg (Allemagne ou Pays-Bas, vers 1575) émaillée de blanc et bordée de noir, des médaillons, des coffrets et plusieurs reliures de missels.

Restaurateur et faussaire
“Le marché des bijoux Renaissance a été sinistré par la découverte de nombreux faux ;  les prix ont stagné pendant vingt-cinq ans. On ne pouvait pas ignorer ce phénomène qu’on a voulu attaquer de front en écartant systématiquement les pièces douteuses”, explique Nicolas Kugel. Ainsi, les frères consacrent-ils une vitrine de l’exposition à la présentation des moulages en plâtre et modèles de bijoux provenant de l’atelier du restaurateur et faussaire Alfred André découvert par le professeur Distelberger. D’abord spécialisé dans la restauration et la rénovation d’objets du Moyen Âge et de la Renaissance, André étendit ensuite son activité à tous les domaines des arts décoratifs, restaurant des pièces d’orfèvrerie, des émaux et des gemmes taillées. Il a laissé de multiples modèles de moulages en plâtre dont une dizaine est exposée rue Saint-Honoré.

- JOYAUX RENAISSANCE, UNE SPLENDEUR RETROUVÉE, jusqu’au 28 octobre, galerie Kugel, 279 rue Saint-Honoré, 75008 Paris. Tél. 01 42 60 86 23. Tlj sauf dimanche, 10 h-19 h.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°113 du 20 octobre 2000, avec le titre suivant : Des bijoux réhabilités

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