Le marché a boudé les tableaux de la collection Lanvin.
PARIS - La dispersion de trente tableaux impressionnistes de la collection Jeanne Lanvin, restés dans la descendance de la couturière pendant plus d’un demi-siècle, devait être la vente de l’année chez Christie’s, le 1er décembre à Paris. Or, avec 7,6 millions d’euros de produit de vente, on est loin du compte. Cette collection était pourtant hautement désirable, par sa prestigieuse provenance comme par la qualité, l’état de conservation et la fraîcheur des œuvres sur le marché. Plusieurs mois auparavant, les maisons de ventes en compétition sur cet ensemble l’avaient estimé jusqu’à 30 millions d’euros sur le marché international. Christie’s a remporté le morceau mais, la crise ayant changé la donne, les estimations ont été revues à la baisse. Une fois cataloguée, la collection valait moins de 20 millions d’euros. Au vu des résultats, il faut croire que cela était encore trop.
La salle de ventes était archipleine le 1er décembre, mais semblait pétrifiée par le niveau de prix des plus grosses pièces. Estimé 2,5 à 3,5 millions d’euros, le tableau phare, La Tapisserie dans le parc (Portrait présumé de Camille Monet), de Pierre Auguste Renoir, n’a pas décroché une seule enchère. Même sanction pour La Femme au chapeau bleu, pastel d’Edgar Degas estimé 800 000 euros au minimum. Les deux œuvres ont été négociées en after sale le lendemain de la vacation respectivement pour 2 millions et 781 000 euros. N’ont pas trouvé preneur Mademoiselle Salle, autre pastel de Degas estimé 800 000 euros minimum ; La Belle Saison, toile de Renoir estimée 700 000 euros, et Scène de plage à Trouville, huile sur panneau d’Eugène Boudin estimée 380 000.
La plus haute enchère est revenue à Femme à l’ombrelle assise dans le jardin (Lise Tréhot), de Renoir, partie à 1,1 million d’euros, sous son estimation basse. Idem pour Femme nue au canapé de Renoir et L’Embarcadère à Trouville (élégantes en crinolines sur la jetée) de Boudin, œuvres attendues l’une et l’autre au-dessus du million et cédées 817 000 euros chacune. De même, La Coiffure (1922), petite huile de la période néoclassique de Pablo Picasso, a été emportée par un collectionneur européen présent dans la salle pour 841 000 euros, sous le 1-1,5 million d’euros escompté. Malgré une ambiance plombée par la retenue manifeste des collectionneurs, deux Renoir se sont bien vendus : Jeune fille de profil pour 697 000 euros, le double de son estimation haute, et Les Petites Laveuses à Cagnes (1913), attendu autour de 200 000 euros et qui a aiguisé les appétits jusqu’à 301 000 euros.
Les mauvais résultats de cette vente au pedigree de premier ordre sont de nature à inquiéter les acteurs du marché. Il s’agit d’abord d’un manque de confiance dans les estimations des maisons de ventes, les vendeurs n’étant pas encore prêts à baisser de manière significative leurs prix. Pourtant, un effort relancerait la demande. Passé la barre des 100 000 euros, les acheteurs hésitent. Ils ont besoin de partager leur désir d’achat avec d’autres enchérisseurs pour se lancer, tout en craignant de surpayer l’objet. In fine, ils restent en retrait. Enfin, l’art impressionniste est depuis quelque temps en perte de vitesse, au profit de l’art moderne qui tire plus son épingle du jeu en temps de crise. « Nous vivons une période difficile de réajustement des prix, commente Thomas Seydoux, directeur international du département art impressionniste et moderne de Christie’s. Nous allons être plus draconiens à l’avenir sur la fixation des estimations. »
Résultats : 7,6 millions d’euros
Estimation : 12 à 18 millions d’euros
Nombre de lots vendus/invendus : 23/7
Lots vendus : 77 %
Pourcentage en valeur : 62 %
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Crise de confiance
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°293 du 12 décembre 2008, avec le titre suivant : Crise de confiance