Aux confins du dessin, de la sculpture et de l’architecture, l’artiste joue avec l’équilibre des matériaux de ses constructions, mais aussi celui des formes.
Paris. Claire-Jeanne Jézéquel est une artiste discrète, réservée. On la devine volontiers capable de longer les murs. D’ailleurs, au début de sa carrière à la fin des années 1980, elle installait ses œuvres sur les plinthes. C’était sa façon de jouer au chat et à la souris avec l’espace en faisant de ce dernier l’enjeu de sa démarche, de réfléchir à la question de l’angle mur-sol, et de manière plus large, d’engager une conversation avec l’angle qui la conduira inévitablement au dialogue avec la courbe. On se souvient aussi de ses plaques de contreplaqué cintrable qui, posées sur des tréteaux, ondulaient comme des vagues, à la limite de la rupture, la rupture du matériau comme celle de la forme. Dans ses œuvres, il est toujours question d’équilibre, au sens propre du terme comme l’artiste l’a souvent montré par le passé ou au sens figuré (mais non pas figuratif) comme ici avec ces rapports de force – entre des couleurs, des formes, des mouvements, des matériaux — qui, mal dosés, pourraient faire basculer chaque œuvre dans un autre registre alors qu’au contraire on se retrouve chaque fois face à une grande justesse dans les combinaisons et les proportions.
Pour sa deuxième exposition à la galerie Jean Fournier, Claire-Jeanne Jézéquel (née en 1965) présente trois séries d’œuvres récentes (22 au total) à première vue très différentes, qui relèvent du même esprit, des mêmes préoccupations, notamment une réflexion sur les notions de frontière, de répartition et, bien évidemment, d’équilibre. La première est constituée de compositions en relief – « je crois revenir au dessin et je ne peux pas m’empêcher de rester en rapport avec la sculpture » justifie l’artiste – à partir d’un morceau de carton bleu recouvert dans sa partie inférieure d’aluminium adhésif qui crée une ligne d’horizon d’autant que la partie supérieure évoque, elle, au loin une ligne de crête et une chaîne de montagne. Fausses perspectives, mais vraie ligne de démarcation visuelle entre la matité du carton et les reflets de l’alu. La deuxième série joue aussi sur la confrontation, non plus de matériaux, mais de deux expressions, celle explosive générée par des taches (rouges, noires) et celle rigoureuse, au beau milieu de ces taches, de formes géométriques crées par soustraction. La troisième série enfin, la plus importante en nombre d’œuvres, réunit un peu tous les aspects évoqués. Elle est elle aussi composée d’œuvres construites autour de la géométrie, mais cette fois avec des bandes de plomb qui enserrent des plaques de verre peintes à la fois dessus, dessous et sens dessus dessous, pour bien mettre en avant cette opposition entre la fluidité et la rectitude, entre lâché et retenu, si chers à Claire-Jeanne Jézéquel.
Les prix vont de 1 000 euros (pour un petit dessin) à 12 000 pour la plus grande composition. Autant dire qu’ils sont mesurés compte tenu de la carrière de l’artiste, qui s’est toujours tenue à l’écart des passages obligés qui font grimper les cotes.
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Claire-Jeanne Jézéquel, la géométrie tout en retenue
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°482 du 23 juin 2017, avec le titre suivant : Claire-Jeanne Jézéquel, la géométrie tout en retenue