Malgré la possibilité de vendre sur place, les transactions ont été calmes sur la foire des antiquaires de Moscou.
MOSCOU - Nouveau lieu, nouveau salon ? Tel est le sentiment qui se dégageait à la visite de la seconde édition du Moscow World Fine Art Fair. Aménagé de manière lisible et lumineuse par le décorateur Patrick Hourcade, l’espace du Manège était autrement plus agréable et impressionnant que celui, calfeutré, du palais Dolgoroukov, siège de la première cuvée en 2004. Passé l’appréciation du changement et le coup de chapeau à Yves Bouvier, énergique maître d’œuvre de l’opération, on regrettait la kyrielle d’œuvres de Charchoune, Lanskoy et autres exilés Russes dévidée sur les stands. De toute évidence, beaucoup d’exposants avaient calqué leur accrochage sur celui du Minotaure (Paris), espérant ainsi bénéficier par contagion de son succès de l’an dernier. Certes, les Russes achètent en priorité les œuvres de leur patrimoine. Mais à trop jouer sur cette corde, certaines galeries en viennent à gauchir leur identité. S’il était logique de voir un mur d’œuvres sur papier de Lanskoy sur le stand d’Antoine Laurentin (Paris), resté fidèle à sa ligne directrice, on s’étonnait de trouver deux œuvres de ce peintre chez Cazeau-La Béraudière (Paris), pourtant peu coutumier de l’artiste. Miser sur la facilité plutôt que montrer son savoir-faire n’est sans doute pas une stratégie porteuse à long terme ! Penser que les Russes ne voyagent pas et leur proposer des invendus d’anciens salons ne l’est pas davantage. On saluait du coup d’autant plus les efforts des galeries Feigen Aaron (Londres) ou Schmit (Paris), laquelle avait disposé les chefs-d’œuvre de son actuelle exposition parisienne : La Fille en rouge de Soutine (1,5 million d’euros) et La Belle Fatima de Van Dongen (3,2 millions d’euros). De même, Luc Bellier (Paris) n’avait pas dérogé à son regard exigeant en montrant un paravent en verre d’Archipenko. « Les gens étaient conscients que j’avais apporté des œuvres et non de la marchandise. On commence à négocier sérieusement pour le Archipenko avec un privé russe », confiait Luc Bellier.
L’enthousiasme ambiant et la foule pressée en masse le week-end aux portes de la foire ne présageaient pas pour autant des affaires trépidantes. « Les ventes restent calmes, convenait Yves Bouvier. Mais les marchands en étaient conscients avant de venir. » Certains exposants affichaient des pièces réservées. La notion de réserve n’a toutefois pas la même fermeté en terre moscovite qu’ailleurs ! Comme on pouvait s’y attendre, la majorité des transactions nouées sur le salon ne seront finalisées qu’à Londres, Paris ou New York, puisque, en toute logique, les marchands répugnent à payer en Russie les 18 % de TVA à l’importation qui ne leur accorde aucune souplesse dans les négociations. Les Russes eux-mêmes préfèrent de plus en plus exporter leurs capitaux.
Comme souvent, les tableaux ont rencontré davantage de succès que les meubles. « On ne vend pas un meuble en trente secondes, mais il y a eu plus d’intérêt que l’an dernier. On a vu plus de gens qui ont fait fortune dans l’immobilier et la nouvelle économie que dans le pétrole », remarquait Marella Rossi (Paris). Faisant front commun avec les Segoura (Paris), celle-ci s’était adjoint les services d’un historien de l’art francophile, Oleg Sokolov. Ce dernier était naturellement plus à même d’identifier les acheteurs éventuels, d’obtenir leurs coordonnées et d’amorcer des négociations. « Il faut être ferme, c’est un bras de fer », admet l’historien. On devine l’euphémisme, car la clientèle russe est réputée versatile et méfiante. Mais ne dit-on pas que tout en Russie est une question de long terme ?
- Dates : du 20 au 26 septembre 2005 - Nombre de visiteurs : 48 000 - Dates de la prochaine édition : du 22 au 29 mai 2006
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Bras de fer à Moscou
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°222 du 7 octobre 2005, avec le titre suivant : Bras de fer à Moscou