La foire de Bâle a tenu ses promesses, cette année encore, en réunissant un plateau exceptionnel d’œuvres, des classiques modernes aux artistes les plus contemporains. Les collectionneurs, notamment américains, qui étaient attendus, attirés par les vernissages des grandes expositions d’art contemporain de l’été européen, n’ont pas manqué le rendez-vous bâlois.
BÂLE - L’effervescence des grands jours régnait dans les travées, à l’ouverture de la 28e foire d’art contemporain de Bâle. La présence de nombreux grands collectionneurs américains rendait l’atmosphère électrique. Certains conservateurs de musées disposant de budgets d’acquisition "intéressants", accueillis d’ordinaire par les galeristes avec beaucoup de prévenance, avouaient même avoir été quelque peu négligés. L’on évoquait aussi le passage éclair d’un patron de presse français tout juste retraité. De fait, en prévision de ces prestigieuses visites, de nombreux marchands ont exposé à Bâle leurs plus belles pièces, n’hésitant pas à sortir des œuvres issues de leurs propres collections. D’autres étaient gardées soigneusement à l’abri des regards indiscrets pour n’être dévoilées qu’aux seuls amateurs fortunés. Ainsi, outre le triptyque de Bacon exposé sur le stand de la galerie Marlborough, un second figurait semble-t-il dans l’enceinte de la foire. Les prix étaient dans l’ensemble raisonnables en regard de la qualité des pièces proposées, surtout par comparaison avec les résultats des dernières ventes aux enchères new-yorkaises dans lesquelles certaines œuvres de jeunes artistes, achetées par des galeries, ont battu tous les records. Transexualis, de Matthew Barney, a été enlevé à 310 000 dollars (1,8 million de francs) lors des vacations des 6 et 7 mai chez Sotheby’s.
La maison anglaise a d’ailleurs soulevé un tollé pour avoir voulu organiser une vente aux enchères à Bâle le soir même du vernissage, au bénéfice de la restauration du toit de la Kunsthalle qui menacerait de s’effondrer. Sotheby’s, associée à la galerie Emmerich – écartée de la foire du fait même de cette union –, a finalement calmé le jeu en se limitant à une soirée mondaine. La bonne tenue des affaires ne pouvait que donner du baume au cœur aux galeries. Sans atteindre le chiffre d’affaires de 4 à 5 millions de dollars (23 à 29 millions de francs) réalisé par la galerie Waddington de Londres, la galerie Lahumière vendait, entre autres, une œuvre sur papier d’Herbin à 21 000 francs suisses (84 000 francs), et la galerie Gagosian de New York cédait pour 100 000 dollars (580 000 francs) à un collectionneur privé européen une toile de la série des Drag Queen de Warhol. Lorinda Ash déclarait "avoir vu les collectionneurs qu’elle attendait et avoir pu en rencontrer de nouveaux". Ainsi, la galerie Holtmann de Cologne exultait après la vente du plus grand Polke de son stand pour 400 000 deutschemarks (1,3 million de francs) à "un collectionneur qu’elle ne connaissait pas et qui s’est décidé très rapidement". Beaucoup de marchands ont indiqué qu’ils avaient rencontré à Bâle de nouveaux collectionneurs, bien informés, plus jeunes et très discrets. Fort de leur réussite professionnelle, ces derniers n’aspirent pourtant pas, comme dans les années quatre-vingt, à appartenir à un monde de l’art médiatisé, évitant les vernissages au profit d’une passion plus privée. Si les jeunes artistes, tels Coupet, Rondinone, Beecroft, Figarella ou Tremblay, se retrouvaient dans la section "Statements", ou dans la section photographie (Made in Eric), la jeune création s’était donnée rendez-vous à "Liste 97". Cette foire confirmait un mal bien français. Alors que notre pavillon obtenait le Lion d’or de la Biennale de Venise, seules deux galeries soutenaient Fabrice Hybert avec des pièces à moins de 10 000 francs : une allemande et une suisse.
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Bâle rebondit entre Venise et Cassel
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : Bâle rebondit entre Venise et Cassel