À Bologne, la foire célèbre sa 40e édition avec une offre certes solide et toujours recherchée, mais peu ouverte sur le monde.
BOLOGNE - Accardi, Bonalumi, Uncini, Melotti, Gilardi, Simeti… : pour l’amateur d’art moderne et contemporain coutumier des salons internationaux, arpenter les allées d’Arte Fiera à Bologne, dont la 40e édition s’est tenue du 29 janvier au 1er février, constitue une expérience peu commune , avec une immersion dans une bulle d’italianité qui semble parfaitement étrangère à la scène internationale. Les exposants, tout comme les visiteurs, y sont à plus de 95 % italiens et viennent de toute la Péninsule ; l’on n’y parle et n’y entend parler qu’italien ; et l’on y expose pour l’essentiel de l’art… italien ! Les seules enseignes visibles sur le circuit international y sont Lia Rumma (Naples, Milan), Continua (San Gimignano), Mazzoleni (Turin, Londres), Dello Scudo (Vérone) ou Tornabuoni (Paris, Londres). En découle au final la sensation qu’y est cultivé un entre-soi feutré et parfois presque hors d’âge, quand certains stands à la moquette grise et au mobilier daté semblaient accrochés comme ceux d’Art Basel il y a une vingtaine d’années – le téléphone de bureau en moins.
Avec 222 exposants répartis sur 20 000 mètres carrés et trois pavillons, l’organisation a cette année vu encore plus grand qu'à l'accoutumée pour célébrer cette édition anniversaire, même si l’ajout du plus petit des pavillons n’était pas nécessaire. Compartimenté en trois sections aussi nouvelles que faméliques – 17 stands consacrés à la photographie, 11 sont voués à des jeunes enseignes et 18 à des « solo shows » –, il souffrait d’un cruel manque d’attrait. Il fallait mettre à part toutefois le bel accrochage dévolu à Mario Schifano par Maloni Arte Contemporanea (San Benedetto del Tronto), un artiste longtemps négligé mais qui connaît un regain d’intérêt, avec ici des œuvres proposées entre 20 000 et 100 000 euros. Et apprécier aussi les peintures du jeune Turinois Guglielmo Castelli proposées par Francesca Antonini (Rome). Commentant la foire et sa très faible proportion d’art contemporain, Carolina Pozzi, directrice de cette dernière enseigne, relevait : « Arte Fiera est la plus ancienne foire d’Italie. On y trouve surtout de l’art moderne et classique, car les collectionneurs y sont un peu plus traditionnels et manifestent peu d’intérêt pour l’art contemporain, raison pour laquelle nous avons également pris un stand dans la section principale. »
« Commerce florissant »
Dans les deux immenses halls principaux, le visiteur se trouvait en effet face à une offre certes inégale mais néanmoins solide pour quiconque s’intéresse aux piliers de l’art transalpin versés dans l’abstraction, la géométrie ou l’optique. Même si, de-ci de-là, quelques « embardées » étaient notables, à l’instar de beaux Raymond Hains sur le stand de L’Elefante (Trévise) ou d’un spectaculaire Alex Katz chez Mazzoli (Modène).
Mais surtout, Arte Fiera est LA foire italienne où se font les affaires. « Bologne c’est quarante ans de business ! », notait pour sa part le tout jeune Thomas Brambilla (Bergame), dont le beau stand rassemblait Ron Gorchov (125 000 dollars, 114 000 euros) et Klaus Rinke. « C’est une foire nationale très populaire. Même si elle n’est pas aussi excellente ou intéressante que par le passé, les collectionneurs ont envie d’y venir, et surtout c’est là que le commerce y est le plus florissant, comparé aux autres foires italiennes. »
Illustration sur le stand de Mazzoleni où trônait un tableau d’Alberto Burri annoncé à 4 millions d’euros ; s’il n’est pas certain qu’il ait été réellement disponible à la vente, l’effet de communication a été démultiplié, confirmant au passage que des prix soutenus ne sont pas extraordinaires dans la très riche région Emilie-Romagne. « Il est notable que les œuvres allant jusqu’à 200 000 euros se vendent ici très facilement », renchérissait une spécialiste du marché de l’art transalpin, ce qui réjouirait n’importe quel participant sur tout autre salon.
En ville
Afin de fêter cette 40e édition, la foire avait en outre essaimé dans la ville en fédérant l’essentiel des musées de Bologne. Ce ne sont pourtant pas les deux manifestations spécialement organisées pour l’occasion, au MAMbo (Musée d’art moderne de Bologne) et à la Pinacotèque nationale de Bologne, qui ont marqué les esprits – deux accrochages tristement plats et sans saveur d’une cinquantaine d’artistes que seule reliait, là encore, leur italianité. Mais la découverte de lieux inattendus s’est révélée captivante, à l’image du Museo di Palazzo Poggi voué aux sciences naturelles ou du Musée international et bibliothèque de la musique, logés dans des palais fastueux. Car au-delà de l’art classique italien, la ville de Bologne mérite toujours le détour pour son patrimoine historique.
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Arte Fiera, de l’italianité !
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°451 du 19 février 2016, avec le titre suivant : Arte Fiera, de l’italianité !