Les temps morts n’existant plus dans le marché de l’art, les galeries accompagnent souvent les collectionneurs dans leur transhumance. Certaines enseignes comme Karsten Greve, Andrea Caratsch ou Gmurzynska ont ouvert des antennes à Saint-Moritz, en Suisse, le fief des vacanciers d’hiver huppés.
La galerie Tornabuoni a préféré, elle, ouvrir dès 1993 à Crans-Montana, dans le canton helvétique du Valais. « Il fallait récupérer le temps de la relation avec le collectionneur, indique Michele Casamonti, directeur de la galerie. Le temps, on peut l’avoir en vacances. » Le galeriste a poursuivi sa stratégie en inaugurant un autre espace en 2000 à Portofino, sur la Riviera italienne, et trois ans plus tard à Forte dei Marmi, en Toscane. « Il faut proposer la même qualité d’œuvres qu’ailleurs, ne pas montrer le second choix ou faire “low profile” [profil bas]. Les gens ne mettent pas leur intelligence ou leur goût en mode “pause” parce qu’ils sont en vacances », précise Michele Casamonti. Ces trois boutures saisonnières n’offrent pas d’expositions monographiques, mais plutôt des accrochages collectifs.
Basé à Cologne, Michael O. Kewenig propose en revanche dans son antenne de Palma de Majorque (Galería Kewenig) des expositions thématiques, en l’occurrence : un face-à-face entre les photographies de Seydou Keita et les dessins de Frédéric Bruly Bouabré, jusqu’au 27 août. Installé depuis 2002 à Mougins (Alpes-Maritimes), la galerie Sintitulo orchestre quant à elle deux expositions cet été : « Céleste Boursier-Mougenot » en juillet, suivie, en août, d’une installation de Sandra Lorenzi, fraîchement sortie de l’école d’art de la Villa Arson, à Nice. La galerie Guy Pieters fonctionne pour sa part tout au long de l’année à Saint-Paul de Vence (Alpes-Maritimes), mais en proposant seulement des accrochages collectifs.
Recevoir les clients
Établie depuis 1975 à Saint-Paul de Vence, Catherine Issert y exerce toute l’année, organisant régulièrement des expositions, au nombre de six cet été avec des artistes liés à la Côte d’Azur tels Claude Viallat, Ben ou Jean-Charles Blais. « J’ai deux points forts à Vence, la Fondation Maeght et [l’hôtel de] la Colombe d’or, explique-t-elle. Je profite des collectionneurs qui ont des maisons secondaires dans les hauts de Saint-Paul, où se trouvent nombre de collectionneurs anglais. Au début, j’ai beaucoup travaillé avec les Suédois, les Belges, les Suisse et les Hollandais. » Ainsi un collectionneur danois installé dans le Midi depuis 1997 lui a-t-il acheté fidèlement depuis quinze ans quelque quatre-vingts pièces.
Alors que sa clientèle estivale représentait initialement une grosse partie de son chiffre d’affaires, Catherine Issert a développé parallèlement son carnet de collectionneurs résidant en province. Si l’été ne correspond pas nécessairement à l’essentiel de ses transactions, cette période lui permet de recevoir les clients, proposer une programmation active et marquer d’une certaine façon son territoire. La galerie Chave, créée en 1947 à Vence, est aussi ouverte quasiment tous les jours de l’année pour répondre au flux régulier de touristes en goguette. « Plusieurs genres de visiteurs viennent à différents moments : les Français pendant les congés scolaires, les Américains et les Nordiques à une autre période », précise Pierre Chave, qui présente jusqu’à fin août une exposition baptisée « L’harmonie des antonymes », réunissant des artistes tels Jean Dubuffet ou Gaston Chaissac.
Si les galeries de l’arrière-pays profitent des collectionneurs en villégiature, tel n’est pas le cas de celles établies à Nice. Ainsi Espace à vendre et Depardieu sont-elles fermées en août. Pour Bertrand Baraudou, directeur d’Espace à vendre, les mois de mai et juin sont plus propices aux voyages « culturels » des touristes et à l’activité commerciale. « L’été pour les galeries est moins intéressant que l’automne », note Antonio Sapone, qui organise néanmoins une exposition autour du Groupe 70 jusqu’au 12 août. « En août, le tourisme à Cannes et Nice est balnéaire, alors qu’à Vence les vacanciers se promènent dans les rues. La période est surtout intéressante pour les musées. » Et, entre musées et galeries, le pont est inexistant. « Le fait d’être situé à côté du Mamac [Musée d’art moderne et d’art contemporain à Nice] nous a très peu apporté, peut-être trois personnes par an », déplore Christian Depardieu.
Depuis 2008, la galeriste parisienne Françoise Livinec a ouvert une antenne à Huelgoat, dans le Finistère. Voilà deux ans, elle inaugure dans la ville un second lieu dans une ancienne école de filles surplombant une forêt et vend d’emblée 120 tableaux. Sur 2 000 mètres carrés de salles d’exposition, elle montre jusqu’au 26 septembre un accrochage sur le thème du détail en peinture, sous le libellé « L’arbre qui cache la forêt ».
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Art et vacances
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Abonnez-vous dès 1 €Saint-Paul de Vence - © photo dynamosquito - 2010 - Licence CC BY-SA 2.0
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°351 du 8 juillet 2011, avec le titre suivant : Art et vacances