L’antiquaire quitte la place Beauvau le 30 mai et cède son stock chez Sotheby’s et Christie’s en trois vacations à New York.
PARIS - Après l’antiquaire Maurice Segoura, c’est au tour d’Ariane Dandois de fermer à Paris ses portes. Le 30 mai, celle-ci met un terme à trente-trois ans d’activité, dont dix Place Beauvau, en vendant son stock en trois vacations à New York. La première, en septembre, sera dédiée à l’art indien chez Christie’s. Les deux autres, de 800 lots de mobilier et objets d’art, auront lieu les 24 et 25 octobre chez Sotheby’s à New York. Pourquoi diviser les objets entre deux auctioneers ? « Les conditions étaient les mêmes de part et d’autre à peu de choses près, confie Ariane Dandois. Ce qui m’a déterminée à choisir Sotheby’s pour le mobilier, c’est la présence de Mario Tavella, qui est le meilleur expert en mobilier européen. Par ailleurs, nous pouvions avoir 1 600 m2 au dixième étage de Sotheby’s, alors que Christie’s ne pouvait nous offrir que 800 m2 pour l’exposition. Pour ce qui est de l’art indien, nous nous sommes orientés vers Christie’s qui a un expert reconnu dans ce domaine, Hugo Weike. » Le choix des États-Unis pour mener ces dispersions s’avère logique, puisque 80 % de la clientèle de la galerie s’avère américaine. Avec 60 % d’objets estimés en dessous de 20 000 dollars et cédés sans prix de réserve, les deux sessions de mobilier affichent une évaluation globale de 13 à 17 millions de dollars. Considérée comme l’une des vingt principaux antiquaires mondiaux, Ariane Dandois n’a pas spontanément abordé une carrière artistique. D’abord journaliste pour Paris Jour, Elle puis France Soir, elle fut par la suite attachée de presse. Elle assurera aussi bien la promotion de congrès sur les implants dentaires, le Midem (Marché international de l’édition musicale) que Port Grimaud (cité lacustre en Provence). Le déclic qui l’incitera à ouvrir une galerie se fait à Londres. Elle rencontre l’éclectique Jean-Claude Ciancimino et le convainc d’ouvrir une galerie avec elle à Paris. Ce sera chose faite en 1974, rue des Saints-Pères. Grâce au stock de Ciancimino et à son entregent personnel, elle reçoit lors du vernissage inaugural le ban et l’arrière-ban du gotha parisien, notamment Yves Saint Laurent qui deviendra son premier client. En 1975, l’échec commercial de son exposition sur le mobilier Ming mettra fin à l’association, mais non à l’amitié, avec Ciancimino. Dans les années 1970, elle réalisera la transaction la plus mémorable de sa carrière : quarante objets d’art oriental achetés par la princesse Ashraf Pahlavi pour son pied-à-terre avenue Montaigne. Par la suite, elle vendra des paravents japonais à Bill Gates.
Mobilier européen
Le début des années 1980 marque un tournant. Le goût de la Chine déclinant, elle élargit son champ d’action au mobilier européen. Elle l’aborde d’abord par le biais du laque, puis se penche sur le mobilier russe et de fil en aiguille couvre l’Europe. « Je suis marginale et fantaisiste, j’ai voulu sortir du rang », indique-t-elle. Ce domaine, que certains de ses collègues commencent tout juste à défricher, sera longtemps jugé « décoratif » par ses confrères, portés sur le grand goût français. Bien qu’elle ne chasse pas sur les mêmes terres, son incursion dans le mobilier marque le début d’une franche inimitié avec quelques antiquaires. « Je suis la seule femme marchand de meubles dans le monde. La dureté de la compétition dépasse ce que j’imaginais. Mes voisins n’ont pas été sympathiques, personne ne m’a donné de coup de main, mais plutôt des coups bas », dégaine-t-elle. Son intimité avec Elie de Rothschild avivera aussi jalousies et railleries.
Aujourd’hui, elle met fin à l’aventure, sa fille Ondine ne souhaitant pas reprendre le flambeau. Et comme toutes les histoires de marchands, celle-ci se solde à l’encan. « Les inventaires sont trop grands. Comment pourrais-je vendre huit cents lots toute seule. La masse est ingérable de manière privée », souligne-t-elle. La scénographie pour la présentation des pièces sera confiée au décorateur Juan Pablo Molyneux, lequel ordonnera la visite comme une promenade, donnant à l’ensemble la coloration d’une house sale plutôt que d’un déstockage. Au terme de la vente, Ariane Dandois s’autorisera un tour du monde d’un an, le temps pour cette mélomane collectionneuse d’art contemporain de prendre du recul avant de sauter dans une nouvelle vie.
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Ariane Dandois ferme ses portes
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°256 du 30 mars 2007, avec le titre suivant : Ariane Dandois ferme ses portes