Le salon madrilène fête son anniversaire du 9 au 13 février en développant de nouveaux secteurs. Plusieurs galeristes français y exposent en s’adaptant au goût ambiant.
MADRID - Pour qui en a assez des salons entendus ou des dispositifs prévisibles, l’ARCO, la foire d’art contemporain de Madrid, qui fête ses vingt-cinq ans, est un rendez-vous réjouissant. « Ce n’est pas un sous-Frieze ou un sous-Art Basel Miami Beach. Elle a sa personnalité propre, souligne
Catherine Thieck, directrice de la Galerie de France (Paris). Madrid permet des décalages, on peut encore avoir des surprises. » Sans la concurrence de certains acheteurs portés uniquement par le buzz anglo-saxon, il est possible de dénicher dans la capitale espagnole des pépites qui ne passeraient pas longtemps inaperçues à Bâle. L’acheteur avisé aurait ainsi pu partir l’an dernier avec un tirage original du Saut dans le vide d’Yves Klein pour 25 000 euros. Ne l’ayant pas vendu sur l’ARCO, la Galerie de France l’a cédé quelques mois plus tard, mais plus cher, à Bâle ! Il faut toutefois, comme à Cologne, l’énergie du marathonien. Retenez votre souffle, car cette nouvelle cuvée compte un focus sur seize projets d’artistes espagnols, une « Black Box » pour la vidéo, un pays invité, l’Autriche, et une section sur les tendances hip-hop et graffitis baptisée « On Youth Culture ». Difficile, enfin, de ne pas perdre son latin dans le renouvellement sémantique des secteurs. La section « Up & Coming », qui a remplacé en 2004 « Cutting Edge », a été rebaptisée l’an dernier « New Territories ». À peine le temps de s’y habituer qu’elle adopte cette année le label « Cityscapes » ! Dans ce bain de jouvence permanent, les galeries modernes grincent souvent des dents en voyant leur espace vital se réduire comme peau de chagrin. « On sent un fort intérêt sur des artistes jeunes ou en milieu de carrière. Mais les artistes plus modernes, donc plus chers, sont plus difficiles à vendre », remarque Jill Silverman, partenaire de la galerie Thaddaeus Ropac (Paris). Du coup, certaines galeries moderne et contemporain classique ont choisi de se regrouper dans une foire off, baptisée « Art Madrid », sur un modèle proche d’Art Paris (1).
« Provincialisme »
Festive et séduisante, l’ARCO n’en est pas moins sous perfusion institutionnelle. Outre la fondation de l’ARCO (174 000 euros), certaines structures comme la fondation Coca-Cola (Madrid) s’astreignent à ne se pourvoir que sur la foire. La part des acheteurs privés a progressé en vingt-cinq ans, mais elle reste congrue. « Je ne pense pas qu’il y ait plus d’une vingtaine de grands collectionneurs comme Enrique Ordoñez, Rafael Tous, Antonio Pérez, convient Rosina Gómez-Baeza, directrice de l’ARCO. En revanche, il y a en Espagne beaucoup de petits collectionneurs. » Ce qui rime avec de petits achats, souvent concentrés sur les galeries hispaniques. D’après le galeriste Michel Soskine (Madrid), la plupart d’entre elles engrangent 60 % de leur chiffre d’affaires annuel sur l’ARCO. Dans un entretien accordé au quotidien espagnol El Comercio, la directrice artistique de la fondation Foto Colectania (Barcelone), Lola Garrido, affirmait que « la collectionnite souffre encore de provincialisme en Espagne ». En épargnant quelques grands noms, tels Juan Abelló et Plácido Arango ou Esther Koplowitz, elle regrettait que « leurs collections se concentrent uniquement sur des artistes traditionnels, sans penser au grand nombre de signatures contemporaines que l’on trouve dans les circuits internationaux, et qui ne suscitent aucun intérêt chez ces acheteurs ». Même si, selon Rosina Gómez-Baeza, les acheteurs se sont ouverts depuis six ou sept ans à l’art international, les collectionneurs locaux jettent en priorité leur dévolu sur leurs propres créateurs. Forte de son arsenal d’artistes ibériques, d’Antoni Tàpies à Jaume Plensa, la Galerie Lelong (Paris) réalise du coup sur l’ARCO autour d’un million d’euros de chiffre d’affaires.
Surréalistes espagnols
Le tout est donc de s’adapter au goût ambiant, voire de se coller à une programmation existante. La galerie Sollertis (Toulouse) proposera un petit one-man-show de Nils-Udo (environ 10 000 euros), à l’affiche du centre d’art Circulo de Bellas Artes (Madrid). La Galerie 1900-2000 (Paris) montre des surréalistes espagnols comme Oscar Dominguez (120 000 et 400 000 euros) et Angel Planells (22 000 euros), et Eduardo Arroyo et le Cubain Kcho siègent chez Louis Carré & Cie (Paris).
Bien que le commerce soit difficile pour les enseignes étrangères, comme il l’est sur n’importe quelle foire nationale ou « nationaliste », les marchands invoquent la présence d’un grand contingent de curateurs, critiques d’art et conservateurs internationaux invités pour les panels de discussion.
Un bonus à ne pas négliger.
(1) Du 7 au 11 février au Palacio de Cristal de la Casa de Campo.
9-13 février, Feria de Madrid, halls 7 et 9, le 9 17h-21h, le 10 10h-19h, le 11 11h-19h, les 12 et 13 12h-19h
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ARCO souffle ses 25 bougies
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Abonnez-vous dès 1 €- Directrice du salon : Rosina Gómez-Baeza - Nombre d’exposants : 298 - Prix des stands : 182 euros le m2 1 129 euros d’insertion catalogue - Nombre de visiteurs en 2004 : 180 000
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°230 du 3 février 2006, avec le titre suivant : ARCO souffle ses 25 bougies