Arco, Art & Co

La foire bénéficie de la confiance retrouvée du marché

Par Le Journal des Arts · Le Journal des Arts

Le 27 février 1998 - 567 mots

Arco, la plus grande foire d’art contemporain en Espagne, qui s’est tenue du 12 au 17 février, présentait cette année un nouveau visage, élégant, sobre et toujours résolument commercial. Les galeristes espagnols semblent en effet avoir tourné le dos aux années noires. En multipliant les animations, la foire madrilène ne brille plus uniquement par son côté marchand.

MADRID - Arco est sans aucun doute le vaisseau amiral du marché de l’art contemporain en Espagne. Sous la direction énergique de Rosina Gómez-Baeza, la manifestation a été repensée en partant du principe qu’elle devait être davantage qu’une simple foire. Dans un pays où les grands collectionneurs sont rares, l’événement constitue le grand rendez-vous de la scène artistique espagnole, même si le critique d’El Pais, Francisco Calvo Serraller, l’a qualifié de “très belle manifestation prétendant être une foire d’art”. Dans son discours d’ouverture, Rosina Gómez-Baeza a souligné la qualité accrue des exposants, due en partie à la confiance retrouvée du marché. Ces propos ont été renforcés par ceux de Soledad Lorenzo, l’une des plus importantes galeristes madrilènes et membre du comité de la foire. Pour elle, la situation est maintenant saine, loin des poussées spéculatives qui avaient envahi le marché espagnol à la fin des années quatre-vingt.

Dans son ensemble, la foire est plus abstraite que figurative, plus monochrome que colorée, présente plus d’œuvres sur papier que d’installations, plus de peintures et moins de photographies, plus de pièces inspirées par la nature que par le corps. La manifestation reste  toujours fortement espagnole : quatre-vingt-cinq galeries nationales sont opposées à cent onze marchands étrangers, parmi lesquels vingt venant du pays invité, le Portugal. Les artistes de renommée internationale n’étaient pas particulièrement bien représentés, mais les œuvres exposées n’étaient pas dénuées d’intérêt, à l’image d’un groupe de dessins de Jean-Michel Basquiat proposés chez Lucien Durand, de Paris, à des prix se situant entre 140 000 et 280 000 francs. Metta, de Madrid, exposait de beaux dessins de Kiki Smith ; Michael Schultz, de Berlin, des dessins de grand format de Baselitz et Lüpertz. Parmi les classiques modernes, la galerie Gmurzynska présentait des dessins de constructivistes russes et un tableau de grande dimension de Léger. La galerie déclarait même “avoir vendu un Picasso (Pipe, verre et paquet de tabac) et une peinture majeure de Delaunay. Les gens sont très intéressés, et l’enthousiasme des jeunes est important. Nous concevons notre rôle à Madrid comme celui d’un musée plus accessible, et nous pensons qu’il est important de montrer également de l’art moderne dans une foire d’art contemporain. Il y a des collectionneurs ici, notamment des Sud-Américains très sérieux”. Pour Marwan Hoss, “les résultats sont bons mais pas exceptionnels, avec des ventes se situant surtout jusqu’à 80 000 francs”. Yvon Lambert estimait également “avoir bien vendu, en particulier des photographies de Nan Goldin, à des prix proches de 20 000 francs”. Alors que la participation anglaise était des plus réduites (Angela Flowers, Michael Hue-Williams, Lotta Hammer et Marlborough), conséquence de la concurrence de la foire de Londres, la participation portugaise, sélectionnée par le jeune critique João Pinharanda, reflétait la foire dans son ensemble, même si la scène lusitanienne est plus diversifiée que l’espagnole. Après des années d’isolement, l’art contemporain y reste peu soutenu, et des galeries de qualité ont dû fermer leurs portes cette année. Arco aura au moins permis à un large public de découvrir des artistes tels que Julião Sarmento ou Pedro Cabrita Reis.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°55 du 27 février 1998, avec le titre suivant : Arco, Art & Co

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