PARIS
Près d’un siècle après la première rétrospective que lui avait consacrée le Musée des arts décoratifs, Jules Chéret tient à nouveau le haut de l’affiche à Paris.
PARIS - Pionnier de l’affiche en couleur et de l’affiche illustrée publicitaire, Jules Chéret (1836-1932) est en terrain familier au Musée de la publicité, au troisième étage du Musée des arts décoratifs à Paris. Près d’un siècle après la rétrospective que lui avait consacrée l’institution parisienne et deux ans après celle du Palais Lumière à Évian, la carrière de Jules Chéret fait à nouveau l’objet d’une exposition monographique, mettant cette fois en avant ses débuts de lithographe et surtout la manière dont son univers, empruntant aux personnages de la commedia dell’arte comme au japonisme, est resté identique au gré de ses aventures pluridisciplinaires. Ou le parcours d’un fils d’ouvrier parfaitement autodidacte dont l’esthétisme aussi explosif qu’évanescent a façonné l’image que l’on se fait aujourd’hui de la Belle Époque. Dans une scénographie (plus ou moins réussie selon les goûts) signée Nestor Perkal, le Musée de la publicité propose un parcours à contre-courant puisqu’il s’ouvre sur l’aboutissement de la carrière du « Watteau des carrefours » : les grandes décorations de commandes publiques (les salons de l’Hôtel de Ville à Paris et de la préfecture de Nice ; le rideau du petit théâtre du Musée Grévin) et privées (villa La Sapinière à Évian, pour le baron Vitta ; la demeure neuilléenne de Maurice Fenaille). Le parcours reprend ensuite le fil chronologique à son origine. Après un bref survol biographique, le visiteur suit sa formation de lithographe et d’illustrateur à Londres, les débuts de son imprimerie à Paris dès 1866 grâce au mécénat du parfumeur britannique Rimmel, son avènement en tant qu’affichiste de spectacles et de publicité, ceci au travers d’un bel ensemble de maquettes, d’essais de couleurs et d’exemplaires avant la lettre. Paris sous le Second Empire, puis sous la Troisième République, regorge de distractions en tout genre (théâtre, ballet, café-concert, cirque…) et Chéret, désireux comme ses comparses, le groupe des « Incohérents », de raviver une joie de vivre éteinte par l’austérité du Salon, ne se lasse pas de mettre en scène farandoles costumées, danseuses et femmes mutines. Au XXIe siècle, une telle débauche de confiseries visuelles peut donner la nausée, mais nul ne saurait dénier à Chéret son inventivité technique, son talent de coloriste et son dynamisme esthétique.
L’œuvre de Jules Chéret appartient tout autant au Musée de la publicité qu’à celui des Arts décoratifs : pour preuve, la première salle inclut un semblant de period room où est rassemblé un ensemble d’objets décoratifs parmi lesquels un mobilier de salon tapissé à l’effigie de Pierrot et Colombine (personnages incontournables), des tapisseries des Gobelins et une paire de vases sculptés. Témoignage d’une époque où la renaissance des arts décoratifs passait par l’indispensable versatilité des artistes.
Commissaires : Réjane Bargiel, conservatrice en chef au Musée de la publicité ; Ségolène Le Men, professeure d’histoire de l’art à l’université Paris-Ouest-Nanterre-La Défense
Itinérance : Museum Villa Stuck, Munich, 10 novembre 2011 au 4 février 2012 ; Musée Toulouse-Lautrec, Albi, second semestre 2012
Scénographie : Nestor Perkal, designer
Jusqu’au 7 novembre, Musée des arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, 75001 Paris, tél. 01 44 55 57 50, www.lesartsdecoratifs.fr, tlj sauf lundi, 11h-18h, 11h-21h le jeudi. Catalogue, coédité par le musée et la Bibliothèque nationale de France, 368 p., 1 600 ill. dont 1 430 en couleurs, 59 euros, ISBN 978-2-916914-14-5.
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Jules Chéret placardé aux Arts déco
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Abonnez-vous dès 1 €Le catalogue de l’exposition inclut une réactualisation du catalogue raisonné des affiches de l’artiste, répertoire lancé en 1896 par Ernest Maindron et complété par Lucy Broido en 1992. Les fonds Gustave-Dutailly, à Chaumont, et les archives Jack-Rennert à New York complètent le panorama constitué en majeure partie par les collections du Musée de la publicité et de la Bibliothèque nationale de France. 1 430 numéros sont désormais répertoriés (contre 882 en 1896 et 1084 en 1992).
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°331 du 24 septembre 2010, avec le titre suivant : Jules Chéret placardé aux Arts déco