Les députés ont voté un amendement ébranlant le statut des monuments historiques privés.
PARIS. C’est un nouveau désaveu pour le gouvernement. Alors que le Premier ministre François Fillon déclarait le 17 novembre au matin, dans le cadre du Forum d’Avignon sur la Culture, avoir « voulu que la déduction fiscale pour les travaux sur les monuments historiques soit la seule qui échappe au plafonnement des niches », dans la nuit, les députés adoptaient un amendement contradictoire. Proposé par Gilles Carrez (UMP), rapporteur de la Commission des finances, cet amendement a suscité de vifs débats. Outre une obligation d’engagement des propriétaires sur une durée de quinze ans et l’interdiction des mises en copropriété sauf avec l’accord du ministère de la Culture, le texte prévoit, en cas de non-ouverture au public, un plafonnement des déductions fiscales octroyées aux propriétaires de monuments historiques à hauteur de 200 000 euros. Par un hasard du calendrier, la Demeure historique (DH), principale association de propriétaires privés de monuments historiques, tenait le lendemain son 84e Congrès national. À la tribune, Jean de Lambertye, son président, s’est dit choqué par une disposition prévoyant de faire échapper à ce plafond les monuments simplement labellisés par la Fondation du Patrimoine. « Que ferait le ministère de la Culture si les propriétaires privés demandaient massivement le déclassement ou la désinscription de leur monument historique pour demander un simple label ? », s’est interrogé Jean de Lambertye. Invité de la DH, le sénateur Philippe Marini (UMP) s’est engagé à défendre devant le Sénat l’esprit de la loi de 1913 instituant les règles de protection et le régime fiscal des monuments historiques. « Cette loi signifie que la communauté nationale se considère comme responsable de la transmission du patrimoine. Même si un monument est fermé au public, la première obligation de son propriétaire est de le transmettre aux générations futures ». Donc d’en financer les travaux d’entretien et de restauration. « Ces sujétions soumises aux propriétaires créent une dette de l’État envers les propriétaires privés », a poursuivi le sénateur.
Réduction des subventions
Face à un auditoire concerné par la réduction des subventions versées par les Directions régionales des affaires culturelles (DRAC), le directeur de l’architecture et du patrimoine, Michel Clément, s’est lancé dans une opération vérité sur la situation budgétaire, grevée depuis 2003 par la suppression des reports de crédits puis la mise en œuvre de la Loi organique relative aux lois de Finances. « Tant que l’ordre n’aura pas été rétabli, la situation sera difficile », a admis Michel Clément. Sur la totalité du programme « Patrimoines », le montant des encours des DRAC atteint désormais 560 millions d’euros, dont 30 millions d’euros de « factures sur table ». « Tout est fait pour restaurer la pleine capacité d’engagement des DRAC », a plaidé Michel Clément sans convaincre. À commencer par le sénateur Yann Gaillard (UMP) (lire l’encadré) qui s’est ainsi interrogé : « comment le directeur du Patrimoine n’a-t-il pas vu le coup venir ? ». « Les fonctionnaires obéissent à des décisions politiques, s’est justifié Michel Clément. En 2003, la décision a été prise de mettre l’argent ailleurs ».
Dans le cadre de la discussion du Projet de loi de finances (PLF) pour 2009, un amendement au budget de la mission Culture, proposé par le sénateur de l’Aube Yann Gaillard (UMP), s’il était adopté en séance publique le 5 décembre, pourrait porter un coup d’arrêt aux grands projets culturels. Dans son rapport de la Commission des finances du Sénat remis le 5 novembre, le sénateur propose, en effet, un amendement prévoyant la suppression de la moitié des autorisations d’engagement de la mission Culture. Pour Yann Gaillard, le projet de budget pose une question de soutenabilité de la politique culturelle, soit de la capacité du ministère à honorer les engagements déjà pris. « Compte tenu du contexte budgétaire et financier contraint et du montant des engagements non couverts, il conviendrait, au cours des prochaines années, de ne réaliser aucun grand projet de construction d’équipement culturel », a estimé le sénateur, citant notamment le cas de la Philharmonie de Paris. Près de 23 % du budget 2009 du programme « Patrimoines » serviront à payer des opérations déjà engagées.
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Nouveaux plafonds pour les monuments privés
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°292 du 28 novembre 2008, avec le titre suivant : Nouveaux plafonds pour les monuments privés