Le frémissement du secteur du mécénat a provoqué l’apparition de nouveaux métiers, à la fois au sein des institutions culturelles et dans les entreprises.
Conséquence logique de l’engouement pour le mécénat suscité par la loi du 1er août 2003 (lire le JdA no 228, 6 janvier 2005), les pratiques se sont aujourd’hui nettement professionnalisées. L’apparition d’offres d’emploi ciblées, pourtant rares dans le secteur culturel, tout comme la multiplication des formations en management culturel au sein des universités ou des écoles de commerce viennent en effet confirmer cette tendance.
Prospection à l’américaine
Autant dire que les jeunes diplômés très qualifiés arrivent en force sur le marché. Plusieurs possibilités s’offrent alors à eux. « J’explique toujours aux jeunes stagiaires que je reçois qu’ils ont aujourd’hui la chance, compte tenu de leur formation, de pouvoir choisir entre deux engagements : au cœur de l’entreprise ou au cœur d’une institution, les deux étant tout aussi passionnants », explique Martine Aublet, conseiller pour le mécénat auprès du directeur de l’établissement public du Musée du quai Branly, à Paris. En d’autres termes : soit du côté des entreprises, c’est-à-dire de celui qui recherche un projet à soutenir, soit du côté de l’institution, c’est-à-dire de celui qui doit aller frapper à la porte du secteur privé. Encouragés depuis quelques années à augmenter de manière substantielle leurs ressources propres, de nombreux établissements culturels publics se sont en effet dotés d’une direction du mécénat. Si celle-ci demeure souvent du ressort du chef d’établissement et de son service de la communication, certains musées, dont l’exemple le plus significatif est celui du Louvre, à Paris, ont créé un véritable pôle mécénat, entièrement dévolu à la recherche de partenaires financiers. Pour l’heure, le Louvre est en effet le seul musée français à disposer d’une brigade de près de vingt personnes, rodées aux techniques de prospection à l’américaine, fichiers internationaux à l’appui, pour ferrer le mécène là où il se trouve. « Nous avons mis en place des outils spécifiques, et perfectionné nos méthodes, notamment en terme de veille stratégique », confirme Christophe Monin, chef du service mécénat et directeur adjoint du service du développement culturel du musée. Un logiciel inédit et spécifique a ainsi été créé. « Nous nous inspirons des techniques du marketing relationnel, confirme Sophie Pidoux, chargée du développement du mécénat au Musée du Louvre, mais la dimension philanthropique et humaniste est essentielle. » Les recrues du service combinent souvent une solide expérience du monde de l’entreprise et une formation en histoire de l’art. L’organisation et l’efficacité de l’équipe du Louvre feront sans doute école.
Projet d’entreprise
Face à ces prospecteurs, la plupart des grandes entreprises recrutent à leur tour des professionnels dotés de compétences juridiques et fiscales, capables de gérer l’interface avec leur direction, seule décisionnaire pour ce type d’opération, qui relève de la stratégie de l’entreprise. Le responsable de mécénat doit ainsi prendre la mesure objective des moyens à mettre en œuvre pour le lancement et la pérennisation d’un projet. En somme, il doit donner son intelligence au mariage pour qu’il soit accepté par tous les salariés. « Le mécénat est désormais un nouvel engagement de l’entreprise dans la société, constate Martine Aublet. Il s’agit donc de trouver des projets forts, clairement identifiables et exclusifs, qui vont rejoindre les valeurs et les attentes de l’entreprise et de son équipe. » Nombreux sont toutefois les grands groupes qui continuent de recourir à des prestataires extérieurs, capables de leur peaufiner des programmes sur mesure en adéquation avec un projet d’entreprise, qui dépassent souvent la simple recherche de financement. Ces spécialistes du conseil en mécénat, indépendants, incarnent en quelque sorte une troisième voie professionnelle, et leur implication est souvent largement antérieure aux nouvelles dispositions fiscales. « C’est un métier dans lequel il faut être convaincu de ce que l’on fait. Mobiliser des fonds pour générer des programmes sur des sujets d’intérêt public nécessite une conviction personnelle », explique Dominique Goutard, présidente-directeur général de l’agence conseil Vocatif. Pour y parvenir, il est donc indispensable de disposer d’un solide relationnel, qui permettra de stimuler les échanges entre les partenaires potentiels d’un même projet (artistes, entreprises ou institutions). « Les jeunes que je recrute sont tous très diplômés, précise Dominique Goutard, mais ils doivent aussi montrer une curiosité permanente sur ce qui bouge autour d’eux, et, bien sûr, savoir échanger. Pour la méthode “Vocatif”, c’est avec moi qu’ils l’acquièrent. » Curiosité, voire inventivité, aisance à communiquer, connaissance du milieu dans lequel s’exercera le mécénat sont donc des qualités requises pour exercer ce métier, qui, s’il est de plus en prisé, offre encore des perspectives en terme de recrutement, principalement dans le domaine de la recherche de fonds. Et plutôt à une échelle de proximité, où il demeure encore peu développé.
- La mission mécénat du ministère de la Culture et de la Communication organise un concours de mémoires sur le mécénat culturel. Il est ouvert aux étudiants de l’enseignement supérieur public ou privé, à partir de la 3e année, et consiste en la rédaction d’un mémoire d’au moins 80 pages sur un sujet ayant trait au mécénat culturel. Contacts : 01 40 15 85 05 ou mission-mecenat@culture.gouv.fr - L’Association pour le développement du mécénat industriel et commercial (Admical) dispense des formations à destination des professionnels et des porteurs de projets. Admical, 16, rue Girardon, 75018 Paris, tél. 01 42 55 20 01, www.admical.org
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Conseiller mécénat
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Abonnez-vous dès 1 €Les formations en management culturel, de type mastère, se sont multipliées en quelques années. Plusieurs universités ou écoles privées proposent désormais des cycles spécialisés en économie ou management des organisations culturelles. Les plus reconnues sont celles des grandes écoles (HEC, Institut d’études politiques de Paris) et de l’université Paris-Dauphine.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°230 du 3 février 2006, avec le titre suivant : Conseiller mécénat