Velickovic, Dans la douleur

Saisie par la puissance expressionniste de l’œuvre du peintre d’origine yougoslave né à Belgrade en 1935, la maîtresse des lieux, la mécène belge Isabelle de Mévius, l’a invité à exposer des toiles grandioses, des dessins et des œuvres plus fragiles sur carton, réparties sur les trois niveaux de son lieu. « L’œuvre de Vladimir Velickovic est une invitation à un recueillement face à notre condition humaine en proie à cet entre-deux existentiel, où nous nous débattons sans relâche devant la question du vide et du néant », écrit-elle en introduction de l’exposition. Peuplée de « gueules cassées » à la Bacon, de chiens galopants et menaçants, de corbeaux, les toiles sombres déploient des paysages dantesques hantés par les guerres : celle de la Seconde Guerre mondiale qui marque son enfance, la guerre civile qui conduit le pays à l’implosion en 1999 au terme de huit années de déchirures et de massacres. Cauchemardesques, les grands formats assaillent le regard dès l’entrée du 1700, défient le visiteur, taraudent sa mémoire. Velickovic livre une peinture intemporelle, celle des grands traumatismes, baroque, intense, essentielle. Ses couleurs charbonneuses sentent le sang, appliquées parfois au doigt, elles gagnent une dimension encore plus introspective. L’art de Velickovic n’a pas fini de nous hanter.