Tout le monde ou presque connaît cette photographie de l’artiste Valie Export, assise, les cheveux en bataille, le pantalon découpé laissant apparaître largement son pubis, une mitraillette à la main, comme pour défendre son corps d’une agression sexuelle.
Une image que les posters ont presque autant popularisée que celle du Che, un emblème du féminisme des années 1960. Ce cliché fait suite à une performance réalisée dans un cinéma porno de Munich, où Valie Export déambulait entre les fauteuils, incitant les spectateurs à la toucher.
On connaît un peu moins son travail depuis cette entrée fondatrice en 1969 sur la scène du Body Art. La double exposition que lui consacrent le Lentos de Linz, où elle naquit en 1940, et le Belvedere de Vienne, où elle vit et travaille aujourd’hui, permet de mesurer l’épaisseur et la cohérence d’une œuvre consacrée à dénoncer les injustices sociales, notamment celles qui touchent les femmes.
Les deux accrochages, thématiques pour pouvoir fonctionner indépendamment l’un de l’autre, offrent chacun un résumé de son travail. Ils mettent cependant en évidence son glissement de la performance vers les installations, et du littéral vers le moins explicite. Hyperbulie, une vidéo de 1973, la montre ainsi, nue, encadrée par des fils électriques qui l’obligent à avancer à tâtons, puis à s’incliner. On aura compris qu’il s’agit d’une métaphore de la « domestication de l’individu ». Plus subtil, des photographies gardent trace d’une performance de 1982 où son corps épouse des blocs d’architecture.
Changement d’échelle avec Fragments of Contact, une installation de 1994 reconstituée dans la première salle qui accueille les visiteurs au Belvedere. Elle est composée de vingt-quatre ampoules au bout de tiges verticales, actionnées par un moteur, qui plongent dans des tubes remplis d’eau ou de lait. L’effet est saisissant, et les mouvements lents des tiges laissent tout loisir aux spectateurs d’y projeter leur imaginaire. Glottis, une installation vidéo déclinée en deux versions à Linz et à Vienne, exhibe sur un ensemble de moniteurs une glotte en pleine action. Tout cela est moins trash que les performances des Actionnistes viennois, la matrice de Valie Export, mais tout aussi troublant.
« Valie Export. Time and Countertime », Lower Belvedere, Rennweg 6, Vienne (Autriche), www.belvedere.at, et Lentos Kunstmuseum, Ernst-Koref-Promenade 1, Linz (Autriche), www.lentos.at, jusqu’au 30 janvier 2011.
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Valie Export s’expose doublement
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°630 du 1 décembre 2010, avec le titre suivant : Valie Export s’expose doublement