Un bon coup de fourchette

MARSEILLE. Le visiteur qui pénètre dans la salle d’exposition des Ateliers d’artistes de la Ville de Marseille découvre trois écrans de 3 x 4 m sur lesquels sont projetés trois moments d’un même dîner. Neuf personnes attablées, croquant à pleines dents poulet et fruits, parlent de tout et de rien, succession de jugements à l’emporte-pièce qui confinent parfois au dialogue de sourds. Tandis que la caméra, dans un mouvement circulaire permanent, fixe les convives sur les deux écrans latéraux, celui du centre, légèrement décalé, fait la part belle aux mains, aux fourchettes et aux plats. Pour cette pièce dans laquelle, selon l’artiste, “ça entre et ça sort”, on pense irrésistiblement aux grands banquets de la peinture flamande, ou, plus récemment, aux films de Peter Greenaway, en particulier au Cuisinier, le voleur, sa femme et son amant. L’artiste a d’ailleurs travaillé pour ce huis clos avec des moyens proches du cinéma, faisant appel à des comédiens professionnels dont le jeu est étonnamment naturel. Nous ne sommes pas non plus très éloignés d’un théâtre intimiste et noir, à commencer par les ultimes paroles échangées : “De toute façon, peu m’importe qui vous êtes. Personne. Je viens juste de vous rencontrer. Cela ne fait rien. Vous partirez. Vous serez remplacés par d’autres”.