De l’Amérique de la Dépression, notre mémoire a retenu surtout le krach boursier du 24 octobre 1929, ses retombées dramatiques, puis la période de reconstruction du New Deal, au cours de laquelle Roosevelt prend des mesures pour rendre courage à un peuple désespéré et donner du travail à tous.
Les premières commandes de peintures murales sont passées à des artistes comme Rivera ou Orozco, récemment arrivés aux États-Unis, qui avaient entrepris au Mexique de réinventer “un art au service des travailleurs”. Des campagnes de photos sont lancées afin de garder en archives les grands travaux industriels. Elles ont fait l’objet d’expositions rétrospectives.
En revanche, on connaît mal les peintures de chevalet et les gravures. Et pourtant, le bilan du programme pour les arts fait état de 5 000 artistes aidés pour 108 000 peintures et, à partir de 11 000 dessins, 240 000 gravures imprimées. La quantité n’a-t-elle pas nui à la qualité ? C’est la question que nous nous sommes posée avant d’entreprendre cette exposition.
Avec le recul, l’expérience de l’Art du New Deal, étiqueté ainsi aux États-Unis, se révèle intéressante à plus d’un titre. Les œuvres émanent d’artistes engagés qui tiennent leur premier congrès en 1936 et qui sont proches des ouvriers, autant de témoignages irremplaçables dont ne nous trouvons pas d’équivalent en Europe. Si Otto Dix ou George Grosz – pour citer ceux que nous avons exposés – dénoncent la guerre, ridiculisent leurs contemporains, comme d’autres artistes de leur époque, ceux-ci sont néanmoins restés à l’écart du monde du travail. Sur le plan du style, ces artistes ont travaillé dans la voie du réalisme, allant comme leurs modèles européens jusqu’à la caricature. Ils ont milité pour un art engagé exaltant les vertus d’une Amérique profonde et néanmoins socialisée. Dans ce contexte d’un art subventionné, certains peintres ont émergé. Hopper est reconnu comme le meilleur représentant de l’Amérique profonde tandis que Pollock est devenu l’un des principaux acteurs de l’Expressionnisme abstrait. Cette expérience a modifié la pratique artistique américaine en amenant les artistes à se préoccuper de leur rôle dans la société.
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Un art de crise
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°32 du 1 janvier 1997, avec le titre suivant : Un art de crise