MONTREAL / CANADA
Françoise Sullivan n’en finit plus d’être célébrée. L’an dernier déjà, la très rigoureuse Galerie de l’UQAM ouvrait ses salles à cette vénérable artiste, et, dans sa quatre-vingt-quinzième année, ce sont celles du Musée d’art contemporain de Montréal qui s’offrent enfin.
Même si l’exposition est un peu trop synthétique, trop classique dans son cheminement chronologique, ne boudons pas notre plaisir de traverser – fût-ce un peu vite – soixante-dix ans d’une carrière menée tambour battant, depuis les toutes premières peintures expressionnistes, vite abandonnées au profit de la danse, qu’elle va pratiquer à New York en 1945 avant de rentrer dans un Québec verrouillé par la bien-pensance catholique. La jeune femme signe en 1948 le manifeste du Refus global, pavé artistique et littéraire jeté dans la mare tranquille et paternaliste de la société québécoise. Elle danse alors dans la neige, une œuvre mémorable qui fera d’elle une pionnière de la danse et de la performance. Deux disciplines qu’elle pratique avec une énergie qui irrigue encore aujourd’hui tout son parcours. Françoise Sullivan se frottera ensuite à l’acier et au plexiglas dans les années 1960 avec des sculptures bondissantes, puis à l’immatérialité toute conceptuelle de la décennie suivante. Depuis le milieu des années 1990, elle a trouvé dans la peinture abstraite, le monochrome notamment, l’endroit de son épanouissement. Même si l’on aurait aimé une célébration plus flamboyante, cet hommage place durablement Françoise Sullivan au firmament des grandes références québécoises.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°719 du 1 janvier 2019, avec le titre suivant : Trésor national