Cette rétrospective orchestrée par l’historien de la bande dessinée Thierry Groensteen s’adresse aussi bien aux fans de l’auteur de Lapinot – un de ses personnages phares – qu’aux néophytes de son œuvre protéiforme.
Les premiers apprécieront la richesse d’un parcours évoquant, à travers cent cinquante originaux (planches, illustrations, carnets), les innombrables facettes d’un dessinateur et scénariste prolifique qui s’est frotté à tous les genres : de l’autobiographie à l’heroic fantasy en passant par le western, le polar, les albums jeunesse, la comédie sentimentale, le jeu de rôles… jusqu’à la bande dessinée expérimentale – car Trondheim, cofondateur de l’OuBaPo (l’Ouvroir de Bande dessinée Potentielle) aime créer sous contrainte. Ses aficionados seront sensibles au fait que l’auteur a pleinement pris part à la conception de cette exposition, émaillée de dessins et de vignettes réalisés à même les murs, ce qui contribue à la rendre très vivante. Les non-initiés découvriront une figure atypique de la création contemporaine, un auteur parvenu à percer dans le 9e art alors qu’il « ne savait pas dessiner », comme le rappelle ironiquement le premier chapitre de cette rétrospective. Bien sûr, le trait s’est précisé avec le temps et l’expérience : on le vérifie tout particulièrement dans les dessins d’observation inédits présentés en fin de parcours. Mais ce que l’on retiendra surtout, c’est la grande liberté d’un artiste aiguillonné par l’impérieuse nécessité de donner corps à ses histoires, sans se laisser enfermer dans aucune case.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°734 du 1 mai 2020, avec le titre suivant : Tout l’univers graphique de Trondheim