La fréquentation décevante de l’Exposition universelle de Hanovre n’a pas empêché la grande roue souterraine de Gabriel Orozco de tourner. L’artiste figure parmi les douze participants d’« In between », qui, dans leur majorité, jouent le jeu de l’exposition comme foire, en s’intégrant dans le paysage de l’Expo 2000.
HANOVRE (de notre correspondante) - Une “heureuse constellation d’événements”, c’est ainsi que Kasper König, commissaire de l’exposition avec Wilfried Dickhoff, qualifie “In Between”, versant artistique de l’Exposition universelle de Hanovre. Profitant d’un budget élevé pour une exposition d’art (environ 4 millions de francs), les deux organisateurs ont invité une douzaine d’artistes internationaux à réaliser des œuvres conçues pour l’occasion, réparties, in between, au milieu, de la manifestation.
“Nous sommes conscients que peu de visiteurs sont réellement intéressés par l’art”, reconnaît Kasper König. Ici, l’art veut exercer une fonction de réactif, de stimulant, de diversion et pourquoi pas de passe-temps. Jusqu’à présent, le public est toutefois loin d’être exalté, malgré l’impact produit par la dimension des œuvres, comme la Rueda de la Fortuna de Gabriel Orozco. Le projet, qui remonte à quelques années, se réfère aux grandes roues, élément clef des Expositions universelles. Mais le manège d’Orozco s’enfonce à moitié sous terre, obligeant le public à un moment d’introspection. L’intervention de Roman Signer est plus minimale. Le Suisse s’est contenté d’installer perpendiculairement à la Hermes Turm, tour symbole de l’Expo, une hampe avec un drapeau rouge actionné par un mécanisme.
Loin de l’engouement de la cinquantaine de pavillons nationaux pour l’informatique et les démonstrations technologiques, l’art semble conserver ses distances face aux nouveaux médias, et aspire à une dimension architecturale, à l’image de la décoration monumentale de Lily Van Der Stokker. L’artiste a imité le motif d’un papier cadeau kitsch sur les quatre côtés et sur le toit du bâtiment de la Halle 10. Un rectangle privé de fenêtres de 70 mètres de long et haut de 48 mètres ! Le Chocolate Blockhead, de Paul McCarthy se réfère, lui, à l’Exposition universelle en tant que parc thématique disneyien, vaste mensonge culturel lié à la consommation, plus proche du spectacle que de la vulgarisation scientifique. Son immense Pinocchio au long nez, abrite une fabrique de chocolat ouverte au public.
Reprenant la devise de l’Expo 2000, “Homme, Nature, Technique”, Carsten Höller et Rosemarie Trockel ont réalisé un bâtiment en forme d’immense globe oculaire pour pigeons, hommes et rats, représentés par des modèles mécaniques, volontairement éloignés de la réalité. Référence au Globe Céleste de Geleron présenté en 1900 à Paris, l’architecture du duo s’insère harmonieusement dans le parc. Avec son humour habituel, Maurizio Cattelan rend compte de la relation de violence instaurée entre l’homme et la nature, par une voiture de luxe dont l’habitacle est transpercé de part en part par un arbre. Plus optimiste, Tsutsumu - Hot Snow de Tobias Rehberger se résume en un jardin zen japonais de 100 m2, recouvert de neige artificielle pour toute la durée de la manifestation.
Mais le second pari d’“In between” est aussi de concevoir l’art dans le contexte d’une situation éphémère et de profiter de la vitrine offerte par les médias. Comme l’explique Kasper König : “Nous comptons sur les prises de vues en plongée de l’exposition, l’installation de Signer ou la grande roue d’Orozco seront montrées sur les télévisions du monde entier. C’est par l’intermédiaire des mass-média que sera représenté ce que les visiteurs ont vu ou expérimenté.”
- IN BETWEEN, Exposition universelle de Hanovre, jusqu’au 1er octobre, tél. 49 0 2000, www.expo2000.de.
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Sur un art de fête
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°108 du 30 juin 2000, avec le titre suivant : Sur un art de fête