Quels metteurs en scène remarquables que ces artistes de Nouvelle-Irlande dont le musée du Quai Branly nous donne à voir les œuvres ! Lors des cérémonies suivant la mort d’un notable, ils utilisaient tous les ressorts de la dramaturgie pour exprimer que, même si le mort intégrait le monde des ancêtres et des esprits, il continuait à se manifester encore aux vivants. Dans ce but, une sculpture était réalisée spécialement, mais n’était pas un portrait du défunt, c’était une simple évocation. Pour permettre à cette image d’agir sur le psychisme des participants, des rituels jouaient sur des successions d’apparitions et de disparitions, suggérant une présence. Tout concourait à ce résultat : splendeur des effets, formes étranges, masques inquiétants, parures somptueuses, luminosité des couleurs, mais aussi musique et danses que font revivre dans les galeries du musée des dispositifs multimédias et un film.
Aucune uniformité dans ce déploiement de scénographies, car chacun des clans de l’île avait ses motifs. Cette longue terre mélanésienne, colonie allemande de 1880 à 1914, fait aujourd’hui partie de l’État indépendant de Papouasie-Nouvelle-Guinée. Les œuvres présentées au musée du Quai Branly datent de la période coloniale, une période féconde en créations de toutes sortes.
Les sculptures malagan nées dans le nord de l’île, objets phares de l’exposition, sont liées à la mort, aux tabous qu’elle entraîne, mais que des rituels permettront de lever. Destinés à ces rituels, les objets malagan comptent parmi les plus spectaculaires de l’Océanie car toujours animés d’une créativité débridée. Tridimensionnels, ils se caractérisent par un inextricable lacis de formes colorées, imbrication arachnéenne de signes qui se fondent les uns dans les autres sous une légère couche de peinture, en rouge, blanc et noir. Œuvres d’artistes respectés, ce sont des figures humaines, des frises horizontales, des poteaux verticaux et surtout des masques. Dans l’un d’eux, de grands poissons représentés à l’horizontale forment les oreilles.
Imposantes figures d’ancêtres, les statues Uli avec leur visage sévère surdimensionné symbolisent le pouvoir des grands chefs. Androgynes, elles unissent dans une même figure l’élément masculin, la force physique qui protège, et le féminin, les seins nourriciers. Moins austère, conçue dans le sud de l’île, une Figure à deux têtes évoque un couple marié vu par les Néo-Irlandais comme « deux esprits, un seul corps ». Un poème d’amour.
musée du Quai Branly, 37, quai Branly, Paris VIIe, tél. 01 56 61 70 00, www.quaibranly.fr, jusqu’au 8 juillet 2007.
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Statuettes et objets rituels du Pacifique sud
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°592 du 1 juin 2007, avec le titre suivant : Statuettes et objets rituels du Pacifique sud