Parfaitement chronologique, cette exposition ne reconstruit pas pour autant une histoire du dessin français au long de cinq siècles.
Ses buts sont autres. D’abord mettre en valeur les liens d’intimité qui se créent entre la pensée, la main et le support. Chaque feuille témoigne de leur accord subtil et recueille les confidences et les observations de l’artiste. Relater ensuite l’histoire de ces œuvres, préciser leurs appartenances successives. Rappeler aussi la pluralité des techniques que le visiteur peut, de la sanguine au fusain et à la mine de plomb, expérimenter dans un « laboratoire » ouvert à son intention. Faire connaître enfin des œuvres inconnues tirées de l’immense fonds du musée au terme de choix éclairés. Présentés dans des cabinets qui permettent d’en apprécier un à un la qualité, cette centaine de dessins sont en soi le miroir des savoirs et des styles des grands maîtres, Coypel, Watteau, Robert, Ingres, Degas, Bonnard, Braque. L’œil est sans cesse séduit par ces délicats portraits, ces paysages oniriques, ces instants pris à la scène ou à la vie quotidienne. Une série d’esquisses préparatoires exécutées au recto et au verso souligne cette fusion qui est à la source d’images à même de « refléter une conception du monde » selon les commissaires, comme celles signées de Claude Lorrain pour Psyché ou de Delacroix pour illustrer son Faust. Sous-estimé à tort par certains, pourtant expression la plus proche et la plus directe de son auteur, le dessin trouve ici sa pleine valeur.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°717 du 1 novembre 2018, avec le titre suivant : Se confier au papier