Art contemporain

Sanejouand et son contraire

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 1 janvier 2006 - 436 mots

PARIS

À 71 ans, Jean-Michel Sanejouand ne se repose toujours pas sur ses lauriers et a accepté l’invitation du Plateau.

Autour des quatre œuvres présentes dans la collection du Frac Île-de-France, l’artiste a composé une nouvelle partition à travers un choix de séries anciennes et d’une pièce créée spécialement pour le lieu. Mais nul doute que le spectateur aura bien du mal à ne pas se croire dans une exposition collective. Car Sanejouand cultive la « non-unité ». Il n’est jamais là où on l’attend. Comme lorsqu’il peint des paysage naïfs et colorés en pleine vague abstraite des années 1970. Il aurait pu continuer d’assembler des éléments du quotidien dans un hors-jeu qui lui avait valu une certaine estime entre 1963 et 1967. Juan-les-Pins est un exemple de ces Charges-Objets, ou la délicate alliance d’une tronçonneuse et d’un coussin, comme un collage de ready-made, Duchamp qui aurait sévi avec Picasso. Mais voilà, Sanejouand ne s’est pas laissé bercer par l’habitude. Il a peint des paysages presque naïfs et colorés puis s’est arrêté pour passer au noir et blanc. Histoire de ne pas avoir la paix, il remet sur le billot ses essais précédents dans des Espaces-Critiques dont un exemple est exposé au Plateau. La distance critique lui permet de tout décadrer, de ne pas décréter. Sanejouand récolte ainsi une étiquette de radical. Par la remise en cause permanente de ses choix et recherches artistiques, il s’est d’ailleurs rendu la tâche plus difficile auprès du public.

Son œuvre est loin d’être simple à approcher dans sa globalité, donnant faussement l’impression de sauter du coq à l’âne, de regarder un artiste versatile, indécis. Mais Sanejouand assume cette indécision. Ce n’est pas facile d’en être le spectateur. Avec lui, il faut abandonner ses habitudes de lecture, son petit confort. Passer d’une salle de dessins et de toiles en noir et blanc à une Organisation de l’espace in situ, ou comment corriger, recadrer un espace par un jeu de miroirs jusqu’à faire ressortir la présence physique du bâtiment. Des toiles, des sculptures, des espaces : il y a beaucoup à redécouvrir chez Sanejouand et notamment sa liberté, cette volonté de ne pas s’enterrer dans une idée, un style, de ne pas répondre aux attentes.

L’œuvre la plus emblématique de ce caractère bien trempé est un Jeu de Topo dont personne n’a les règles puisqu’elles n’existent pas. Il faut juste avoir le courage de les inventer. Et bien finalement, la visite d’une telle exposition poursuit cette logique de liberté : c’est à vous de jouer.

« Jean-Michel Sanejouand », Le Plateau, 22 rue des Alouettes, Paris XIXe, tél. 01 53 19 84 10,www.fracidf-leplateau.com, jusqu’au 19 février.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°576 du 1 janvier 2006, avec le titre suivant : Sanejouand et son contraire

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