Un nouveau segment de l’œuvre de Raoul Hausmann (1886-1971) est proposé dans les salles de cet imposant château limousin qui, conservant en dehors de Berlin un fonds considérable sur cet artiste protéiforme, a de quoi séduire les amateurs du mouvement dada et ceux qui ne le sont pas encore.
Hausmann, qui disait s’appeler aussi Luoar Nnamsuah car il aimait les palindromes, est à partir de 1945 en relation avec de nombreux poètes étrangers qui veulent « libérer le parler de l’esclavage grammatical ». Conçue en trois actes, la visite permet de suivre dans ses explorations cet homme-anagramme qui inverse le sens des signes pour en composer d’autres. Dépliant leurs étonnements à la manière d’une bande de Möbius, les créations d’Hausmann semblent être en perpétuelle mutation. Le parcours mêle le sonore et le visuel, la « poésure et la peintrie ». Le projet de couverture de la revuePIN, rarement présenté, voisine avec cent trente feutres originaux, donnant une idée du foisonnement de l’artiste. Pour employer un mot récent qu’il ne connaissait pas mais qui lui aurait plu, Hausmann est transmédia. En retrait mais présentes, se découpent les silhouettes des compagnons de ses aventures esthétiques et littéraires comme Hans Arp, László Moholy-Nagy, Otto Freundlich et les tenants italiens de l’Arte nucleare. D’autres noms, Antonin Artaud, Alechinsky, Queneau, concourent avec leurs œuvres à enrichir un parcours un peu déroutant au début. Une exposition reconnue d’intérêt national par le ministère de la Culture.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°729 du 1 décembre 2019, avec le titre suivant : Raoul Hausmann ou le perpetuum mobile