À Trondheim, le prix Lorck Schive, l’un des mieux dotés au monde, donne un coup de projecteur sur une scène artistique en quête de visibilité.
Trondheim (Norvège).« Ça n’est pas le Turner Prize, mais nous travaillons à ce que ça le devienne ! », confie dans un sourire enthousiaste Johan Börjesson, directeur du Kunstmuseum de Trondheim qui accueille l’exposition des quatre nommés du Lorck Schive Kunstpris. Pour sa troisième édition, le prix d’art contemporain, l’un des mieux dotés au monde avec un total de 1,1 million de couronnes norvégiennes (soit environ 117 000 euros), souhaite étendre sa visibilité hors des frontières de la Norvège. Il porte le nom de Christian Lorck Schive (1805-1879), notable de Trondheim qui décida avec son épouse de créer à partir des revenus générés par ses nombreuses propriétés un fonds destiné à soutenir les jeunes artistes norvégiens. Ce trust, toujours en activité, a créé en 2013 un prix indépendant, attribué tous les deux ans à un artiste vivant en Norvège. La dotation elle-même est assez particulière : chaque artiste nommé reçoit l’équivalent de 16 000 euros pour produire une œuvre, et le gagnant empoche la coquette somme de 53 000 euros.
Dans un contexte où le marché de l’art est plutôt terne, en dépit de la richesse du pays, troisième exportateur mondial de pétrole, le prix Lorck Schive est l’opportunité de faire connaître la scène artistique scandinave au-delà de la mer du Nord. Nichée au creux d’un fjord, Trondheim est surtout célèbre pour abriter l’impressionnante cathédrale gothique de Nidaros. Mais la ville a connu depuis le début des années 2010 un nouveau dynamisme grâce notamment à l’impulsion donnée par le Kunstmuseum et son précédent directeur, Pontus Kyander. Dans son sillage a ouvert fin 2016 une Kunsthalle [centre d’art], qui accueille actuellement une exposition de l’artiste américaine Lisa Tan, ainsi que des lieux alternatifs comme RAKE, structure éphémère fondée par des artistes qui comptent parmi les nombreux à être attirés par les loyers peu élevés et quartiers en autogestion de Trondheim.
Une émulation à laquelle participe le prix Lorck Schive, qui a depuis sa création récompensé trois femmes : Lene Berg et Marianne Heier, ex aequo en 2013, puis Vanessa Baird en 2015. Cette année ont été nommés trois hommes et une femme, exposant chacun dans une salle du Kunstmuseum. Knut Henrik Henriksen rend hommage à l’architecte norvégien Erling Viksjø et à son esthétique brutaliste par des sculptures de béton mêlé de galets. Lars Laumann combine dans une installation assez sombre des souvenirs d’une enfance marquée par Tchernobyl et l’épidémie de sida, et des éléments locaux comme une gargouille provenant de la cathédrale. Vibeke Tandberg explore également l’intime mais dans une vision plus enjouée : moulant en plâtre les portes de son réfrigérateur ou dépeçant un billard, elle transforme son intérieur en sorte d’autoportrait cubiste. Enfin, le projet le plus simple et le plus percutant à la fois est celui du Suédois Mattias Härenstam, Limitation, qui fait tourner le long d’un rail circulaire un jeune bouleau tête en bas, laissant une traînée de feuilles, évocation romantique des paysages scandinaves.
Un jury international, composé des commissaires indépendantes Heidi Ballet et Maria Lind et de l’artiste Per Formo, remettra le prix le 18 novembre prochain.
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Prix : la Norvège gâte ses artistes
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L'œuvre de Knut Henrik Henriksen présentée pour le Lorck Schive Kunstpris 2017 © Photo: TKM / Susann Jamtøy.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°487 du 20 octobre 2017, avec le titre suivant : Prix : la Norvège gâte ses artistes