Art moderne

Paris-3e

Pollock avant Pollock

Musée Picasso – jusqu’au 19 janvier 2025

Par Amélie Adamo · L'ŒIL

Le 21 octobre 2024 - 315 mots

XXe Siècle -  Le critique américain Clement Greenberg en a fait le chantre de l’abstraction outre-Atlantique et a cloisonné son œuvre dans une lecture progressiste en lisant ses grands drippings exposés en 1948, chez la galeriste Betty Parsons, comme l’aboutissement d’une pure autonomie de la forme, en rupture avec la figuration.

Contre cette lecture formaliste, l’exposition du Musée Picasso reconsidère la place de la figure dans l’œuvre de Jackson Pollock (1912-1956) et son enracinement dans un fond mythique essentiel. Une manière de remettre en lumière l’apport complexe des avant-gardes européennes, souvent occulté par une réception critique désireuse d’ériger l’artiste en figure de proue de la peinture américaine. Formé au début des années 1930 chez le peintre régionaliste Thomas Hart Benton, Pollock se détache progressivement des thèmes liés à l’observation d’une réalité sociale pour explorer une figuration hybride et totémique, déformée et fragmentée, nourrie tant de sources picassiennes que d’emprunts aux sculptures et masques des natifs américains. Cet apport se matérialise aussi dans la production sculptée de l’artiste, moins connue, et dont on peut voir ici, dans l’exposition, un étonnant os taillé, représentant simultanément un visage humain et un profil animal. Œuvre très expressive qui rappelle les mas totémiques haïdas découverts au MoMA en 1941. Cette décennie est aussi marquée par l’arrivée des surréalistes à New York. Cette autre influence décisive mêlée aux théories de la psychanalyse jungienne mène Jackson Pollock à multiplier les sujets mythologiques et à expérimenter divers procédés automatiques. C’est entre 1943 et 1946 que s’opère une nouvelle expérience de l’espace et du monumental, par le développement d’une pratique de peinture projetée sur la toile posée à même le sol, jouant des accidents et d’une gestuelle très spontanée. Ces expérimentations le mènent aux grands drippings (1948) dont la radicalité abstraite n’est cependant que de courte durée, l’artiste réintroduisant dès 1951 des figures et des titres en référence à des rituels et des figures totémiques.

« Jackson Pollock, les premières années 1934-1947 »,
Musée Picasso, 5, rue de Thorigny, Paris-3e, www.museepicassoparis.fr

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°780 du 1 novembre 2024, avec le titre suivant : Pollock avant Pollock

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