Bien plus qu’un sculpteur, Puget fut un artiste complet et fécond, qui exerça son génie fertile dans tous les domaines de l’art. Marseille, sa ville natale, se devait bien de lui rendre hommage en une rétrospective – la première de cette importance qui lui est consacrée – de plus de cent cinquante œuvres, tant sculptées que peintes ou dessinées.
MARSEILLE - Célébré depuis le XVIIe siècle – Falconet, Delacroix, Cézanne l’ont admiré – le nom de Pierre Puget n’en évoquait pas moins une image romantique à laquelle Baudelaire n’était pas étranger, entretenant une nouvelle fois le culte de l’artiste maudit. L’exposition tempère quelque peu ce souvenir et met en lumière l’homme – apprécié de son souverain –, et son œuvre, synthèse de deux cultures.
Issu d’une famille de maçons marseillais, Puget fit son apprentissage chez un constructeur de navires. Il gagna tôt l’Italie et s’y forma à la peinture aux côtés de Pierre de Cortone. De retour en France, il s’installa à Toulon. De ses premières années datent la plupart de ses tableaux, très influencés par l’École bolonaise, notamment Guerchin et Guido Reni.
Le portail aux Atlantes de l’hôtel de ville de Toulon, fortement empreint de l’art de Michel-Ange, marque un tournant dans la carrière de Puget, qui paraît alors se consacrer à la sculpture. Partageant son temps entre la France et l’Italie, il eut partout de prestigieux commanditaires : Fouquet pour Vaux, le duc de Mantoue, de riches familles génoises, et bien sûr Louis XIV et Colbert pour Versailles.
D’abord influencé par le Cinquecento florentin (Hercule et l’hydre), il assimila ensuite à Gênes les courants italiens les plus modernes et produisit des œuvres du plus pur baroque, qui ne le disputent en intensité qu’à celles du Bernin (Saint évêque en extase, Saint Sébastien). En France, il s’adapta à un classicisme puissant qui lui valut l’honneur des commandes royales (Alexandre et Diogène, Milon de Crotone, Persée et Andromède).
Des navires de guerre
Cependant, même s’il eut du succès à la cour, Puget continua à travailler au sud de la Loire. Excellent dessinateur, c’est à son installation à l’arsenal de Toulon que l’on doit les projets de décoration des navires de guerre. De même, ses merveilleux vélins illustrent d’élégantes et fantastiques galères, plantées dans un décor marin imaginaire, ponctué de ruines aux allures inquiétantes.
Puget fut aussi architecte. En témoignent de nombreux projets, dont beaucoup ne furent pas exécutés en raison de leur magnificence et de leur coût (l’arsenal de Toulon). Il imagina aussi une "Place royale" pour Marseille, pensée d’urbanisme monumentale qui s’inspirait des travaux des plus grands – Michel-Ange, Cortone, Perrault, Hardouin-Mansart. Des bâtiments achevés, il ne reste guère aujourd’hui à Marseille que la "Halle aux poissons" et la "Vieille Charité", qui abritera l’exposition, recueillant ainsi en son sein les œuvres de son créateur.
Marseille, Centre de la Vieille-Charité, 28 octobre 1994-30 janvier 1995 ; Gênes, Palais ducal, 1er mars-30 mai 1995 ; "Pierre Puget-Fortune critique", Marseille, Musée des beaux-arts, 28 octobre 1994-30 janvier 1995.
Commissaires de l’exposition : Marie-Paule Vial, Giovanna Rotondi Terminiello, Ezia Gavazza. Catalogue collectif, coédition Musées de Marseille / Réunion des musées nationaux, 350 p.
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Pierre Puget, artiste complet
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°7 du 1 octobre 1994, avec le titre suivant : Pierre Puget, artiste complet