Picasso, l’effervescence des formes

Il n’en est rien. Conçue par l’historien et critique d’art Stéphane Guégan, elle parvient à renouveler notre regard sur le maître. Picasso fut élevé dans une famille andalouse profondément catholique : ses premiers dessins représentent la Cène et les Pèlerins d’Emmaüs, et son premier chef-d’œuvre, peint à 15 ans, figure la première communion de sa sœur. Pour celui qui deviendra un lecteur de Pascal, le vin est d’abord consacré pendant la messe pour devenir le sang du Christ. Si la première section de cette exposition montre donc un « Picasso catholique », la question du sacré imprègne en filigrane l’ensemble du parcours et s’avère passionnante. De fait, pour Picasso, le vin s’invite aussi bien à la table du repas, où il offre l’occasion du partage, que dans son œuvre, où il devient symbole : celui de l’ivresse créatrice ou des Bacchanales, du monde des bistrots, de la terre, du sang et de l’angoisse de la mort. Mais on voit également la bouteille de vin devenir pour lui une source inépuisable d’inspiration formelle, aussi bien dans ses recherches cubistes que dans ses céramiques. À travers ces dernières, il réinvente, à Vallauris, le vocabulaire du vin et du partage, dans un pichet espagnol aux formes d’oiseau coloré ou d’une femme agenouillée qui se révèle aussi bouteille… mêlant sacré et profane.