DIJON
Dans un esprit très proche de celui de "Paris-Bruxelles, Bruxelles-Paris, 1848-1914", l’exposition "Prague 1900-1938" évoque les liens étroits noués au début du siècle entre les artistes pragois et les avant-gardes européennes. Les 300 œuvres rassemblées par la Galerie nationale de Prague et le Musée des beaux-arts de Dijon – peintures, sculptures, photographies, objets d’art et dessins d’architecture – rappellent efficacement l’importance de la création pragoise dans l’éclosion de l’art moderne.
DIJON. À l’exception de quelques figures majeures, comme Kupka, Mucha et Síma, les artistes tchèques sont étrangement méconnus en France, et ce malgré les échanges culturels intenses qui ont régné entre les deux pays depuis la naissance de la République tchécoslovaque, en 1918, jusqu’à son démembrement par l’Allemagne nazie, vingt ans plus tard. Durant cette période de construction nationale, Prague se tourne en effet volontiers vers l’Europe occidentale pour redéfinir son identité culturelle, comme en témoignent les séjours de Mucha, Kupka, Kubin, Filla et Gutfreund à Paris, bientôt suivis par ceux de Styrsky, Toyen et Síma. L’acquisition d’œuvres cubistes de Picasso et Braque par le collectionneur Kramár, les expositions Rodin et Munch à Prague, ou encore la participation tchèque à l’Exposition internationale d’architecture du Bauhaus ont également contribué aux échanges culturels entre pays. Les artistes pragois parviennent à s’approprier les expériences occidentales, qu’ils expriment sous une forme originale. L’exposition présente successivement les principaux mouvements d’avant-garde tchèques, depuis le Symbolisme et l’interprétation très décorative qu’en donne Mucha, ou celle plus romantique de Preisler. Le parcours se poursuit avec Kupka et Bílek qui atteignent, dans leurs œuvres abstraites, une harmonie musicale très sensuelle, avant de s’adonner à un expressionnisme moins désespéré et plus élégant que celui de Munch, leur génial inspirateur. Le Cubisme trouve une application tout à fait unique en Europe dans l’architecture et le design, sous la houlette de Janák, Chochol, Hofman et Gocár, tandis que les peintres et le sculpteur Otto Gutfreund utilisent la fragmentation des formes pour exprimer les passions intérieures. Après la guerre et l’indépendance, le groupe Devetsil – composé notamment de Styrsky, Toyen et Teige – insère images et textes au sein de constructions géométriques abstraites et se livre à des photomontages qui annoncent déjà le Surréalisme. Ce mouvement, représenté par Síma à Paris, assurera la gloire de la capitale tchécoslovaque dans les années trente. Mettant systématiquement en valeur ce qui fait la spécificité des avant-gardes pragoises, l’exposition présente, en contrepoint à chaque mouvement, les œuvres étrangères dont l’influence a été déterminante. Voyage dans la "capitale secrète des avant-gardes", elle amène également à réfléchir sur les infinies possibilités contenues dans l’art d’un Rodin, d’un Picasso ou d’un Man Ray.
PRAGUE 1900-1938, CAPITALE SECRÈTE DES AVANT-GARDES, jusqu’au 13 octobre, Musée des beaux-arts, Palais des États de Bourgogne, Dijon, tél. 03 80 74 52 09, fax 03 80 74 53 44, tlj sauf mardi, 10h-18h. Catalogue édité par la Ville de Dijon, 220 F broché, 295 F relié.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Paris-Prague, Prague-Paris ?
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°41 du 4 juillet 1997, avec le titre suivant : Paris-Prague, Prague-Paris ?