BALE / SUISSE
Différente : tel est le terme qui convient pour parler de l’exposition Picasso à la Fondation Beyeler en regard de sa première présentation au Musée d’Orsay.
Si elle réunit aussi les principaux chefs-d’œuvre, à l’instar de La Vie (1903) et de LaFillette à la corbeille fleurie (1905), et opte pour un parcours chrono-thématique, l’exposition suisse diffère par bien des aspects. Par son titre d’abord, « Picasso, bleu et rose » à Paris devient, à Bâle, « Le Jeune Picasso, périodes bleue et rose » et, surtout, par son propos. S’appesantissant moins sur les premiers pas de Picasso à Paris, elle s’étend en revanche jusqu’à 1907 et les débuts du cubisme. De 1901 à 1907, se retrouvent déclinés les mêmes variations de tonalités, tantôt bleuâtres, rosées ou ocre, et les mêmes motifs (arlequins, nus, etc.) qu’à Orsay, mais pas toujours au moyen des mêmes œuvres : ainsi, les remarquables Tête d’Arlequin (1905) et Femme nue assise, les jambes croisées (1906) n’étaient pas montrées à Paris. Par ailleurs, les dessins « érotiques » ont cédé leur place à des gouaches de grand format, dont Le Marchand de gui (1902/1903). Avec moins d’œuvres (soixante-quinze contre trois cents à Paris) et dans une scénographie plus épurée, l’exposition bâloise s’attache davantage à relier le travail quasi sculptural sur les corps des périodes bleue et rose avec les premières expérimentations cubistes du maître, dont La Femme, étude pour Les Demoiselles d’Avignon (1907, Fondation Beyeler). Manière de se distinguer donc, mais aussi d’ouvrir vers « Picasso panorama », la riche collection Picasso de la fondation, allant de 1907 à 1972, présentée simultanément.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°721 du 1 mars 2019, avec le titre suivant : Pablo Picasso, mutatis mutandis