Cité d’affaires plus que capitale, métropole plus que centre, New York a vu son importance décupler au cours de la première moitié du XIXe siècle. Quelle place ont pris les arts dans une telle croissance ? Au Metropolitan, « Art and the Empire City : New York, 1825-1861 » regroupe 310 œuvres, commandées ou réalisées par des New-Yorkais, pour répondre à cette question.
NEW YORK - Portée par un parti pris contextuel rare pour le Metropolitan Museum, l’exposition lie l’émergence de la ville à l’achèvement en 1825 du canal Érié, inauguré par le marquis de Lafayette. Joignant la côte à la région des Grands Lacs, la voie allait bouleverser l’économie de la cité. Les peintres de l’époque avaient d’ailleurs su prendre la mesure de l’événement en se ruant sur le Français pour réaliser son portrait. Télescopage amusant, un portrait de l’aristocrate par Samuel F.B. Morse (1826), inventeur du télégraphe quelques années plus tard, figure dans l’exposition. Pour les New-Yorkais, l’acquisition d’œuvres d’art devient alors le symbole de la civilisation et de l’urbanisation, marque de leur rupture avec la vie des pionniers. Mais la Grande Pomme ne s’est pas débarrassée facilement de la rudesse de ses mœurs : le commerce de l’art se faisait dans les tavernes ou les boutiques, et les premiers musées, tel le légendaire hall d’expositions géré par le cirque Barnum, présentaient des animaux à deux têtes et des monstres.
Sous l’impulsion de quelques personnalités, le goût des citadins se porta peu à peu vers les maîtres anciens, importés d’Europe, et parfois passés sous la main des faussaires. Figurent dans l’exposition des tableaux présentés à New York et achetés par des New-Yorkais au début de cette phase de collectionnite aiguë : gravures de Rembrandt et de Rubens, mais aussi un Grand Paysage de Jacob Van Ruysdael, exposé pour la première fois outre-Atlantique en 1830, et le Triomphe de la Renommée, plateau de naissance de Laurent de Médicis réalisé par Giovanni di Ser Giovanni. D’abord dans la célèbre collection de Thomas Bryan, l’œuvre passe par la New York Historical Society avant d’arriver au Metropolitan. Pendant cette période, le goût des marchands pour le portrait se double d’un intérêt pour le paysage. Domaine où les Américains imposent pour la première fois leur propre style. En 1825, le maire de New York, lui-même ancien commissaire-priseur, achète pour cinquante dollars le Lac aux arbres morts de Thomas Cole.
Quadrillage précoce
Paysage urbain sans pareil, New York a déjà acquis en 1850 certaines de ses caractéristiques. Les salles consacrées à l’architecture de la cité retracent l’adoption du tracé en quadrillé des rues en 1835 et la construction par l’État d’un palais de Cristal, destiné à promouvoir l’industrie et, en second lieu, la culture. C’est à la fin de cette période qu’est conçu Central Park. On devait y adjoindre le Metropolitan en 1870. Documents et œuvres, les photos de cette période tiennent une grande place dans l’exposition. Introduit en 1830 par un Samuel F.B. Morse, décidément décisif, le nouveau médium fait rage à New York. Dans les années 1840, la ville regroupait plus de studios de daguerréotypes que toute l’Europe !
Clin d’œil, Le Cœur des Andes(1859) de Frederic Church conclut l’exposition. Lors de sa première exposition, 12 000 personnes s’étaient massées devant son cadre noir. Conçu pour créer l’illusion d’une fenêtre ouverte sur un paysage, il a été recréé pour l’occasion. En 1864, la toile a été présentée une seconde fois à un public encore plus nombreux pour réunir des fonds pour les blessés de guerre. Succès à l’origine de la création du Metropolitan Museum.
- ART AND THE EMPIRE CITY : NEW YORK, 1825-1861, jusqu’au 7 janvier 2001, Metropolitan Museum of Art, New York, 5e avenue, www.metmuseum.org, tlj sauf mardi, 9h30-17h30, 9h30-21h, les vendredis et samedis.
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New York, New York
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°111 du 22 septembre 2000, avec le titre suivant : New York, New York