musée

Morellet post-Dada

Par Eric de Chassey · L'ŒIL

Le 1 décembre 2000 - 408 mots

Il y a presque quinze ans qu’on n’avait pas vu à Paris une grande exposition consacrée à Morellet.
Je ne veux pas parler bien sûr de cet abbé Morellet « que Voltaire appelait Mord-les » (Balzac, Ursule Mirouet) et à qui Chateaubriand reprochait, dans sa préface à Atala, de n’avoir pas su comprendre que « les douleurs ne sont point éternelles ». Mais de « François Morellet, artiste né à Cholet, dans le Maine-et-Loire, en 1926 », considéré par beaucoup comme l’un des plus grands artistes français vivants et dont on peut s’étonner d’ailleurs, étant donné sa méthode et sa verve, qu’il n’ait encore produit aucune œuvre où il fasse usage de son homonyme oublié. Depuis l’exposition du Centre Pompidou en 1986, les expositions plus spécialisées consacrées à l’un ou l’autre aspect ou moment de son travail se sont cependant multipliées un peu partout, accompagnées par des catalogues et surtout par une monographie (Serge Lemoine, Morellet, éd. Flammarion, 1996). Mais l’on ne peut que se réjouir de voir à nouveau réunis les éléments d’une œuvre qui a beaucoup évolué ces dernières années tout en restant fidèle aux principes que l’artiste a posés au milieu des années 50. Apparemment mené par la logique de l’abstraction géométrique, François Morellet est l’un de ces rares artistes qui ont su relever au cours de la deuxième moitié du XXe siècle les alliances avec le dadaïsme que ce courant avait su tisser dans les années 20. Suivant une pente plus volontiers potache que celle de son ami Ellsworth Kelly (avec qui il partage une méthode de création qui rejette la composition et privilégie le système, le hasard et un rapport distancié au réel), ses œuvres possèdent cependant une rigueur formelle qui ne s’est guère démentie, s’insérant à l’occasion dans le paysage où certaines sont placées (villes ou parcs) avec une efficacité visuelle indéniable. Si l’introduction dans l’espace pictural de fragments de nature comme dans la série Géométree de 1983-85 n’était peut-être pas une solution très subtile pour souligner l’écart entre l’abstraction et le motif naturel, il en va très différemment des récentes séries fondées depuis 1998 sur l’utilisation du nombre  –  piquants,  picturaux,  rococos et autres  cycles – utilisant notamment comme moyens des néons monumentaux. Ne serait-ce que pour la confrontation des dernières œuvres avec celles des début l’exposition du Jeu de Paume devrait valoir la peine.

PARIS, galerie du Jeu de Paume, jusqu’au 21 janvier et TOULOUSE, galerie Sollertis, jusqu’au 30 décembre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°522 du 1 décembre 2000, avec le titre suivant : Morellet post-Dada

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