Mondrian au fil des pages

Le Journal des Arts

Le 1 février 1995 - 457 mots

En marge des rétrospectives, les publications se multiplient. Un coup d’œil sur le cas Mondrian, un peu mal aimé en France.

Les publications en français consacrées à Mondrian ne sont pas légion. Les écrits du peintre, un pan essentiel de ses recherches à partir de 1917, n’ont à ce jour fait l’objet d’aucune traduction. Seule sa correspondance avec Alfred Roth a été publiée chez Gallimard (voir JdA  n° 10).

L’essentiel des recherches qui lui sont consacrées vient naturellement des Pays-Bas et du monde anglo-saxon. Aux côtés d’Yves-Alain Bois, H.L.C. Jaffé, Robert Welsh, Herbert Henkels et Carel Blotkamp se sont imposés comme les meilleurs spécialistes du peintre. Parallèlement à l’exposition, Blotkamp a publié un essai intéressant, Mondrian. The Art of Destruction, qui constitue une excellente initiation avant de visiter l’exposition. L’ouvrage n’est, hélas, pas encore traduit en français.

Le titre surprendra. L’œuvre de Mondrian apparaît à ce point construite que l’exigence iconoclaste mise en relief par Blotkamp pourrait paraître abusive. C’est que Mondrian, après des débuts réalistes, en vient rapidement à formuler sa quête comme une recherche de la perfection. Celle-ci s’esquisse dans l’ambiguïté du réel dont témoigne l’œuvre symboliste des dernières années du XIXe siècle, auxquelles l’auteur n’accorde pas réellement d’importance. La lecture du catalogue, Piet Mondriaan ; The Amsterdam Years, devrait corriger cette perspective. La recherche de l’absolu doit aller au travers des évidences de la réalité. C’est ici que s’impose l’iconoclasme que Mondrian assimile à une table rase.

La formation théosophique, l’ésotérisme et la discipline protestante orientent des recherches qui trouveront leur formulation plastique lorsque les toiles cubistes de Braque et de Picasso seront exposées au Cercle artistique d’Amsterdam. Blotkamp retrace ces différentes étapes qui, en 1912, conduisent Mondrian à Paris. La guerre l’y surprendra et le ramènera aux Pays-Bas, où tout se met en place pour une radicalisation dont De Stijl sortira en 1917.

L’ouvrage de Blotkamp se développe en quatre parties : avant 1914, la recherche de l’idéal ; de 1914 à 1919, l’exploration d’une réalité abstraite à travers la nature ; l’élaboration d’un système universel qui déborde la peinture pour toucher les autres arts et toutes les disciplines de la vie. Enfin, au dernier chapitre, l’étude de l’itinéraire de Mondrian : Paris, Londres, puis New York où il meurt en 1944. Une sorte de métaphore du déplacement qui pousse l’Avant-garde vers l’Amérique.

C. Blotkamp, Mondrian. The Art of Destruction, Londres, Reaktion Book, 1994 (environ 360 F)
Piet Mondriaan ; The Amsterdam Years, 1892-1912, Amsterdam, Gemeentearchief-Thot Publishers, 1994 (environ 210 F)
Sans oublier les écrits de Mondrian, The New Art - The New Life. The Collected Writings of Piet Mondrian, réunis par son disciple américain Harry Holtzmann, et publiés par G.K. Hall à Boston dans une nouvelle édition en 1986 (environ 295 F)

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°11 du 1 février 1995, avec le titre suivant : Mondrian au fil des pages

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