Fantomatique - Depuis sa rénovation – achevée fin 2019 –, le musée Ingres Bourdelle de Montauban dispose d’une salle dédiée à une installation d’art contemporain.
Située au sous-sol de l’édifice, cette salle dite du Prince noir, avec ses voûtes en pierre et ses vestiges antiques (notamment deux sarcophages), est l’antithèse d’un white cube. Invités cette année, Anne et Patrick Poirier l’ont investie avec un sens très sûr de la dramaturgie. Le nom du lieu, évocateur de ténèbres et de mystère, les a séduits, et le couple d’artistes a tiré le meilleur profit de sa configuration souterraine, transformant à l’aide d’un sol miroitant et de néons cet espace contraint en un tableau stupéfiant, saturé de couleurs. « Ah oui, vous pouvez parler de paradis, vous qui déshonorez la terre ! » : la citation du philosophe et poète Henry David Thoreau, tracée en lettres de feu, est sans équivoque. Elle est placée ici au centre d’une scène dédoublée par son propre reflet, spectacle d’un désastre en cours, dont quelques corbeaux de mauvais augure sont les seuls témoins. Crépusculaire, la bande-son (composée par le fils d’Anne et Patrick Poirier, Alain-Guillaume, disparu en 2002) emplit l’espace de sa présence fantomatique, tandis qu’un puits exhale par bouffées un panache de fumée. La fragilité du monde, la dualité de son reflet, sont des motifs récurrents dans l’œuvre que poursuit, avec une vitalité créative intacte, le duo. En témoignent aussi les deux vitrines emplies d’objets et de fragments glanés dans les environs, clin d’œil en forme de rébus malicieux à leur passion pour l’archéologie.
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Monde en abyme
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°768 du 1 octobre 2023, avec le titre suivant : Monde en abyme