De l’eau, du papier, du fusain ou du pastel, voilà une trentaine d’années que Michel Haas a choisi ses « outils ». Des outils qu’il utilise à cru pour faire de la peinture, sans autre forme de procès, faisant macérer son papier, de l’Arjomari de 400 grammes, le fouillant, le creusant violemment avec ses bâtons de couleurs jusqu’à ce que la forme choisie soit « cuite », comme il dit. Ses modèles, il les emprunte à la vie de tous les jours, à la rue, au monde alentour : un couple, un musicien, un homme qui lit son journal, un autre qui offre des fleurs, un coursier sur sa motocyclette, une fleur, un visage…, croisés, captés ici et là, mémorisés en attente de ressurgir un jour ou l’autre et de délivrer alors toute leur magie, leur dimension d’éternité. Autant de sujets d’une extrême banalité, qui disent le courant de l’existence, à la façon tant de ce jeune Fifre que de cette simple Asperge peints tous deux par Manet. « La peinture n’est autre chose que la peinture, elle n’exprime qu’elle-même » disait l’auteur du Déjeuner sur l’herbe. Michel Haas peut facilement reprendre cette formule à son compte. Ce qu’il propose en revanche, c’est une nouvelle façon de faire cette peinture, soucieux qu’il est de faire sortir la vie de ce maëlstrom dans lequel il trempe et dont l’atelier s’est fait le laboratoire. Les figures de Michel Haas adviennent en effet au cours de nombreuses opérations où la matière triturée tente de suivre les excursions de la pensée. Elles s’en informent, elles les incarnent, elles en prennent vie et parole.
« À la matière même un verbe est attaché » proclame Gérard de Nerval dans les Vers Dorés. Telle est la peinture de Michel Haas.
GENÈVE, galerie Jan Krugier, jusqu’au 27 novembre.
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Michel Haas, matière et pensée
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°510 du 1 octobre 1999, avec le titre suivant : Michel Haas, matière et pensée