Encore des masques ! Rassurez-vous, le spectacle ici n’est pas dans les masques mais dans leur juxtaposition, dans le désordre qui devient message. Le xxe siècle a peiné pour mettre de l’ordre dans ses musées. On s’efforce maintenant de lire le texte à l’envers, décrypter une autre réalité. Tous ces « faux visages » exposés viennent du monde entier, datant de l’Antiquité ou sont contemporains. Ils ne sont pas des portraits, plutôt des images abstraites, déformées, voilées de mystère. Portiers de l’invisible, ils apparaissent toujours dans des zones de passage, d’échange entre le réel et autre chose. Peut-être des « interfaces » qui relient et en même temps séparent le monde des humains et un au-delà inconnu, un domaine sacré. Face au sacré, l’homme risque la mort, il se dissimule, se masque. En Afrique et en Océanie, ces visages d’emprunt étaient liés à l’initiation des jeunes accédant à l’âge adulte, aux cérémonies de passage, liés au mariage, ou encore à cette ultime initiation que sont les rituels funéraires. Toute rupture d’équilibre appelait des danses masquées pour restaurer l’ordre, affronter la guerre. Ces visages d’esprit côtoient dans l’exposition des masques himalayens, précolombiens, japonais, insulindiens. En Océanie, la violence des formes déchirées, échevelées accentue encore cette initiation au non-humain et souligne l’horrible. Mais venu d’Asie, voici un visage apaisé de Bouddha qui propose une autre vision, à découvrir. Car ici tout est découverte. Paul Valéry ne disait-il pas : « Une œuvre d’art devrait nous apprendre que nous n’avions pas vu ce que nous voyons. »
« L’Homme et ses masques : chefs-d’œuvre de la collection Barbier-Mueller », PARIS, musée Jacquemart-André, 158 bd Haussmann, VIIIe, tél. 01 45 62 16 36, 24 mai-28 août.
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Masques de partout, masques de toujours
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°571 du 1 juillet 2005, avec le titre suivant : Masques de partout, masques de toujours