Lorsque la lecture d’un monde peuplé de puissances invisibles introduit à contempler des masques, des statues et des fétiches africains présentés dans un ordonnancement bien précis afin de décrypter cette fascinante, déroutante et redoutable fabrique des images que fut et demeure encore l’Afrique noire, la magie opère.
L’invitation à la magie est lancée par le Musée d’Aquitaine qui propose un parcours jalonné de pièces exceptionnelles, pour la plupart jamais montrées au public, et sorties de collections à 80 % privées tels les masques Lulua ou Gouro Bété aux locutions plastiques particulières. La lecture en ces espaces du rez-de-chaussée est d’autant plus aisée que Paul Matharan, le commissaire de cette exposition, par ailleurs conservateur au musée, l’a ordonné en présentant l’une après l’autre, les trois grandes catégories de la création africaine non sans que, régulièrement, par l’intermédiaire de photographies et de films, les objets ne soient replacés dans leur contexte et dans « leur caractère polyvalent ».
« Masques, objets de savoir », « Statues, objets de devoir » et « Fétiches, objets de pouvoir » déclinent ainsi en trois salles quelque deux cents pièces de collection à la variété de formes esthétiques et de fonctions telles que l’on mesure la créativité et la diversité artistiques des peuples africains tout en s’imprégnant des rôles de leurs multiples intercesseurs dont le plus ancien – une statue Soninké du Mali – remonte au XIe siècle.
Si « l’exposition « La fabrique des images », organisée l’an dernier au Quai Branly, a été l’élément déclencheur de cette idée d’exposition », comme le souligne Paul Matharan, le souci didactique d’expliquer la spécificité et le sens de cet art analogiste est avec l’obtention de pièces d’exception, l’axe majeur de la construction de cette éblouissante présentation des arts d’Afrique. Un souci didactique affiché tout du long avec des cartels explicatifs, des repères géographiques et des masques et costumes de cérémonie, comme ces costumes de danse Bamiléké ou Pendé entièrement reconstitués, mais aussi, dès le préambule de l’exposition, avec l’accrochage d’une trentaine de photographies noir et blanc d’Agnès Pataux [voir les Dogons p. 52] sur les féticheurs et les fétiches rencontrés au cours de ses voyages récents en Afrique.
Une manière d’ancrer masques, sculptures, fétiches et cérémonies à venir dans une réalité concrète et de tisser des liens « dans cet univers par essence enchevêtré » qui, de l’Afrique sahélienne à l’Afrique centrale en passant par l’Afrique de l’Ouest, entraîne « à pénétrer dans la complexité de telles pensées » subtilement et sans jamais ôter aux pièces exposées leur part de mystère et de secret.
« Arts d’Afrique, voir l’invisible »
Musée d’Aquitaine, 20, cours Pasteur, Bordeaux (33), tél. 05 56 01 51 00, jusqu’au 21 août 2011.
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Magique Afrique
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°636 du 1 juin 2011, avec le titre suivant : Magique Afrique