À considérer l’œuvre de Louis Valtat entre 1895 et 1905, force est de reconnaître qu’elle est emblématique d’un effet d’époque prospectif qui procède de l’irrésistible propension d’un certain nombre d’artistes à envisager la peinture comme un mode pleinement autonome.
En déclarant en août 1890 dans Art et Critique qu’il convient de « se rappeler qu’un tableau, avant d’être un cheval de bataille, une femme nue ou une quelconque anecdote, est essentiellement une surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées », Maurice Denis enfonçait les portes d’une histoire de l’art qui n’était soucieuse jusque-là que de mimêsis. Si cette déclaration n’a pas eu pour effet immédiat d’entraîner les artistes à l’abandon sine die du réel, elle en envisageait la possibilité. Du moins incitait-elle les artistes à appréhender la peinture dans sa relation au monde de façon distanciée.
Le petit grain de fougue en moins…
C’est ce qu’a parfaitement compris Louis Valtat que l’influence des Nabis a éloigné du pointillisme de sa jeunesse pour le rapprocher encore plus des exemples d’indépendance et de liberté de Vincent Van Gogh et de Paul Gauguin. Si, thématiquement, l’artiste décline toute une iconographie convenue de paysages, de portraits ou de scènes d’intérieur, il ne s’interdit pas pour autant de les traiter en utilisant une palette souvent audacieuse dans l’usage des tons et des valeurs. Il affectionne particulièrement les rouges vifs, les bleus-mauves et les jaunes très solaires, comme en témoignent Les Porteuses d’eau (1897) ou Le Rastel d’Agay (c. 1798), deux de ses meilleures peintures que l’on pourrait qualifier de fauves avant l’heure. À ceci près toutefois qu’il leur manque quelque chose d’une fougue dans la forme, voire d’un grain de folie qui entraînerait celle-ci à la dérive d’une distorsion – comme il en est chez Derain ou Vlaminck – à laquelle Louis Valtat ne cède pas, à quelques exceptions près. De fait, si son œuvre atteste d’éminentes qualités de coloriste, elle procède globalement d’une harmonie plutôt que d’un déchirement.
1869 Naissance à Dieppe.
1886 Valtat entre à l’École des beaux-arts de Paris.
1894 Réalise un décor pour le théâtre de l’Œuvre avec Toulouse Lautrec.
1895 Atteint de phtisie, une forme de tuberculose, il part en cure à Banyuls et rencontre Aristide Maillol.
1900 Ambroise Vollard achète ses œuvres.
1905 Vit à Montmartre avec sa femme Suzanne.
1914 Installé près du Bois de Boulogne, il peint ses lacs.
1924 Séjours dans sa résidence à Choisel (78) où son jardin l’inspire.
1951 Accède à la reconnaissance avec l’exposition « Le fauvisme » au Mnam de Paris.
1952 Décède à Choisel.
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Louis Valtat, pour une peinture indépendante
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°633 du 1 mars 2011, avec le titre suivant : Louis Valtat, pour une peinture indépendante