Somme toute, la question posée par « L’Événement », exposition actuellement présentée au Jeu de paume, site Concorde, est aussi simple que cela : qui fait donc l’histoire ? Du moins s’interroge-t-elle sur les mécanismes qui portent les faits historiques au rang d’événements. Question de représentation, de communication et, pour tout dire, de médiatisation dont acte la fringale permanente de l’époque contemporaine à l’égard de l’image.
Du factuel à l’événementiel, l’écart est à la mesure des moyens médiatiques mis en œuvre pour faire d’une situation un jalon incontournable de l’histoire. Si telle opération s’effectuait jadis par le biais de la peinture ou de l’écrit – on sait l’importance des chroniques et de l’image peinte dans la fortune critique de l’histoire –, c’est la photographie et la télévision qui en sont aujourd’hui les vecteurs.
Au travers d’une sélection de cinq grands moments significatifs – bataille, révolution sociale, attentat, exploit, etc. –, l’exposition parisienne s’applique à démontrer comment l’image contribue à faire, voire à « écrire » l’Histoire. Au cours du siècle précédent, la culture visuelle a connu un tel essor qu’elle est devenue un élément constitutif du quotidien de nos sociétés ; son économie en règle non seulement l’organisation et la gestion mais en structure aussi la mémoire.
Les photographies réunies au Jeu de paume témoignent avec une redoutable efficacité de cet état de fait qui inscrit l’événement dans notre culture de l’information comme une donnée naturelle de l’histoire. La guerre de Crimée, la conquête de l’air, les congés payés, la chute du mur de Berlin et l’attentat du 11 septembre y sont documentés, historiés et commentés de sorte à être chargés d’une dimension quasi mythologique.
La vue soudainement proche d’un fait du passé fixé sur la pellicule, la force expressive d’un plan, le raccourci de sens d’un cadrage sont autant de critères qui font de ces images comme des acteurs de l’histoire. Au commencement était le fait, puis vint sa médiatisation et l’événement surgit. Il s’imposa dès lors à la conscience collective et son empreinte modela cette dernière. Tel est l’enseignement de cette exposition dont l’un des mérites est de nous inviter à nous prémunir de l’autorité du « tout image ».
« L’Événement, les images comme acteurs de l’histoire », Jeu de paume, 1, place de la Concorde, Paris VIIIe, tél. 01 47 03 12 52, www.jeudepaume.org, jusqu’au 1er avril 2007.
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L’image, cette fabrique de l'Histoire
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°588 du 1 février 2007, avec le titre suivant : L’image, cette fabrique de l'Histoire