La rétrospective Ladislas Kijno ouvre un nouveau volet du cycle d’expositions consacrées par le Palais des beaux-arts de Lille à des artistes contemporains originaires du Nord. 80 peintures, 45 dessins et 30 études donnent un aperçu de l’œuvre prolifique d’un artiste qui conçoit son art comme un combat politique.
LILLE - La peinture de Kijno, nourrie par une gamme colorée restreinte, frappe le regard et, bien qu’elle ait connu plusieurs étapes, reste indissociable de son engagement politique en faveur de la paix et de l’égalité sociale. Né à Varsovie en 1921, Ladislas Kijno s’installe avec sa famille à Nœux-les-Mines en 1925. Dès 1946, il expérimente une nouvelle technique qui fera son succès dans les années cinquante : les “papiers froissés”. Il joue avec son support, le froisse, l’écrase et l’étire à volonté, lui donnant l’aspect d’une peau. L’œuvre qui en résulte hésite alors entre tableau et sculpture.
Hanté par la guerre
L’exposition s’ouvre donc sur ces papiers qui sont restés comme une signature de l’artiste. Parmi eux se distingue une œuvre choc datée de 1965, L’Enfant brûlé du Viêt-nam. Dans cet enfant recroquevillé, transparaît la forme ronde, dénominateur commun de ses créations. Ses tableaux des années soixante sont hantés par le thème de la guerre : à celle d’Algérie succède celle du Viêt-nam. Kijno est alors un des premiers à utiliser le spray : “C’est en couvrant les murs d’inscriptions que j’ai réalisé ce que je pouvais tirer de la bombe à peinture.” Puis, fasciné par la vibration de la lumière dans les icônes, il entreprend peu après son retour de Moscou, en 1973, une suite thématique en hommage à Andreï Roublev, moine et peintre du Moyen Âge. Cette décennie voit l’apparition de ses réalisations en hommage à des hommes et des femmes l’ayant marqué tels Galilée, Gagarine, Angela Davis ou Max Ernst.
Enfin, l’exposition s’achève sur l’évocation de sa mythologie personnelle. Nourrie par les cultures qu’il découvre au cours de ses nombreux voyages, elle rassemble des représentations de Bouddha, de Moai (ces grandes statues gardiennes de l’île de Pâques) et du dieu océanien Maké-Maké, mi-homme mi-oiseau. Bien qu’il se soit tourné vers les croyances polythéistes de l’Asie, de l’Afrique et de l’Océanie, Kijno reste pourtant très marqué par ses deux années de séminaire et ses études philosophiques comme en témoigne, notamment, le triptyque Les Portes du Purgatoire.
Jusqu’au 15 octobre, Palais des beaux-arts de Lille, Place de la République, 59000 Lille, tél. 03 20 06 78 00, tlj sauf mardi 10h-18h, 14h-18h le lundi et 10h-19h le vendredi. Catalogue édité par la Ville de Lille, 192 p., 180 F.
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Lille aux couleurs de Kijno
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Abonnez-vous dès 1 €Du Nord ... Kijno ayant offert à la Ville de Lille son Théâtre de Neruda, cette suite monumentale de 30 peintures froissées réalisée pour la Biennale de Venise de 1980, se trouve désormais dans le hall d’entrée du Palais des congrès conçu par Rem Koolhaas. Lille lui doit également le vitrail de la façade qui vient, près de cent cinquante ans après le début de sa construction, achever la cathédrale de la Treille.
... au Sud. Les cimaises de la galerie J. E. Bernard (13 rue de la Grange Fusterie, 84000 Avignon, tél. 04 90 80 04 04) accueillent, jusqu’au 29 juillet, ses célèbres Papiers froissés. Et pour clore cette série d’hommages, Arte diffusera, le 30 juillet, de 10h à 11h un documentaire de Dominik Rimbault qui a suivi le peintre pendant une dizaine d’années.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°108 du 30 juin 2000, avec le titre suivant : Lille aux couleurs de Kijno