Longtemps considéré comme simple réceptacle dans la culture occidentale, le minéral est au contraire un organisme vivant et actif.
Le Musée Zadkine propose en ce moment une exposition, modeste mais intéressante, témoignant du caractère organique de la pierre.
Dans la première salle, un Graffiti photographié par Brassaï dialogue avec la Tête en pierre de Picasso sculptée à la hâte – l’Espagnol avouera à Brassaï son intérêt pour ces « éraflures du mur » qui rythment la ville. Dès le début du XXe siècle, sculpteurs et plasticiens rendent compte, à la suite des révolutions rodiniennes, d’une « vitalité » de la matière : la pierre, le marbre… Brâncusi révèlera la pierre et ses propriétés dans Le Baiser et dans ses travaux successifs.
Puis, au loin dans l’espace d’exposition, plusieurs artistes contemporains réinterprètent le monde minéral. Dans une vidéo de 52 minutes, les artistes Fabien Giraud et Raphaël Siboni filment la mesure minérale (un bloc minéral exposé dans le département de minéralogie au Musée d’histoire naturelle) en un plan séquence extrêmement lent à même de saisir le rythme de la nature. Dans un même mouvement de retrait par rapport à la matière, Jean-Michel Sanejouand agence des pierres qu’il a amassées afin de créer un tout qui parle de lui-même.
Visiblement, les artistes contemporains pensent le minéral, non plus à travers la différence traditionnelle « sujet-objet », mais à travers une réciprocité, comme le montre la photographie Autoportrait de Claude Cahun, où on le voit se fondre dans une masse pierreuse. Les deux entités se réunissent, l’homme « est » minéral. Finalement, « être pierre », cela pourrait vouloir dire : déhiérarchiser et harmoniser le rapport de l’homme à la nature. Ambitieux projet.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°707 du 1 décembre 2017, avec le titre suivant : L’homme minéral
