L’esprit des lieux

En mai dernier, l’intelligence de la prise en charge de l’espace et de l’histoire de ce lieu industriel par un premier cycle d’expositions fut saluée. On retrouve aujourd’hui cette même intelligence à l’œuvre, en particulier dans l’exposition « Bureaux fantômes » conçue dans les espaces administratifs désaffectés des garages Citroën. Mêlant les collections de design de Pompidou avec celles de l’Adam Museum de Bruxelles, cette proposition injecte dans ces anciens bureaux un air vivifiant empreint de rêverie et d’humour. On croise le premier ordinateur électronique conçu par Sottsass, ainsi que ceux imaginés par Jonathan Ive pour Apple. Des pièces iconiques du design italien contestataire des années 1960-1970, comme le bureau Quaderna de Superstudio ou le porte-manteau Cactus de Guido Drocco & Franco Mello, font la peau aux idéaux modernistes. La chaise d’Alain Gilles réalisée à partir de bouchons de bouteilles en plastique recyclés trône dans le bureau du président, quand le bureau de la DRH accueille le siège Up7 de Gaetano Pesce en forme de pied surdimensionné ainsi que le personnage Bouloum d’Olivier Mourgue… Chaque bureau est métamorphosé en un espace de travail irrationnel et déroutant. Dans les anciens ateliers de tôlerie et de peinture, l’exposition, qui met à l’honneur la sculpture aux XXe et XXIe siècles à travers le prisme du processus constructif, mérite aussi le détour. Des œuvres phares du minimalisme côtoient des propositions héritières de cette démarche qui prennent souvent la tangente par le biais de l’humour, à l’instar de François Morellet, John Baldessari ou de la Coréenne Haegue Yang. Les formats spectaculaires des pièces présentées dialoguent très bien avec le lieu.